Le directeur du Fonds monétaire international (FMI), Dominique Strauss-Kahn, a déclaré jeudi à New Delhi qu'il ne fallait pas "sous-estimer l'importance" de la crise de la dette européenne tout en jugeant que l'économie irlandaise allait se reprendre après son récent renflouage.
A l'occasion de cette visite en Inde, le pays qui connaît la plus forte croissance après la Chine, M. Strauss-Kahn s'est par ailleurs déclaré favorable à ce que son successeur à la tête du FMI, tout comme le patron de la Banque mondiale, ne soient plus issus d'Europe ou des Etats-Unis.
"Nous ne devrions pas sous-estimer l'importance de la crise, qui, en Irlande, vient essentiellement du secteur bancaire", a déclaré M. Strauss-Kahn à des journalistes à l'issue de discussions avec le ministre indien des Finances, Pranab Mukherjee.
"Mais je pense que la décision qui a été prise va régler les problèmes dans le secteur bancaire et l'économie irlandaise va se reprendre plutôt rapidement", a-t-il ajouté.
Les membres de l'Union européenne (UE) ont adopté dimanche un plan de sauvetage de 85 milliards d'euros en faveur de l'Irlande auquel s'est joint le Fonds monétaire international (FMI), comme pour la Grèce au printemps.
Cette aide a calmé les craintes concernant l'Irlande mais elle a été suivie par d'intenses spéculations concernant une possible contagion de la crise de la dette en Espagne et au Portugal.
Devant des ambassadeurs et des hommes d'affaires, le directeur du FMI a ensuite mis en parallèle la vitalité économique asiatique et la lente reprise de la zone euro.
"La crise en Europe est encore forte", a-t-il déclaré, ajoutant que plusieurs pays de la zone euro allaient devoir réduire à moyen terme leur déficit public. "Même de petites économies peuvent causer beaucoup de dommages", a-t-il déclaré.
"La reprise mondiale avance, mais elle est encore en phase d'émergence et est fragile", a encore estimé M. Strauss-Kahn. "Dans certaines parties du monde, en Asie, en Amérique du Sud et dans certaines régions d'Afrique, la croissance est bonne", a-t-il ajouté.
L'Inde a enregistré une croissance de 8,9% de juillet à septembre, au deuxième trimestre de son année budgétaire, soit presque le même rythme insolent qu'avant le début de la crise mondiale.
"Il faut le comparer avec ce qui se passe aux Etats-Unis et avec la situation en Europe", a-t-il encore souligné, approuvant au passage la décision prise par la Banque centrale américaine d'injecter 600 milliards de dollars supplémentaires dans le circuit bancaire car selon lui la priorité numéro un reste la croissance.
A quelques jours de la visite en Inde du président français Nicolas Saros qui vient de prendre les rênes du G20, Dominique Strauss-Kahn a par ailleurs appelé à ce que le Groupe ne soit pas seulement "le lieu où l'on discute des problèmes et on prend des décisions mais aussi un lieu pour partager les expériences".
A cet égard, il a notamment cité l'objectif de l'Inde d'une "croissance inclusive" visant à améliorer la qualité de vie tous les citoyens.
Concernant son successeur M. Strauss-Kahn, dont le mandat au FMI court jusqu'en 2012, a déclaré lors d'une conférence de presse qu'il y avait "depuis le début" un accord informel entre Américains et Européens pour prendre la tête du FMI et de la Banque mondiale, mais que "le monde a changé".
"Le FMI a dit qu'il était nécessaire d'avoir une sélection ouverte, ce qui veut dire que cet accord est, de mon point de vue, terminé. Cela ne veut pas dire pour autant que les Américains et les Européens seront interdits" à la tête des institutions, a-t-il ajouté.
"A la fin de mon deuxième, troisième, quatrième mandat au FMI, quelqu'un d'une autre région du monde deviendra mon heureux successeur", a-t-il ironisé, après avoir été interrogé sur son éventuelle candidature à la présidentielle française.