Les dirigeants européens espèrent avoir circonscrit l'incendie après un plan de sauvetage à l'Irlande, mais se heurtaient toujours lundi au scepticisme des marchés et aux critiques acerbes des Irlandais, qui jugent les contreparties trop sévères.
"J'espère" que l'incendie est éteint, a déclaré la ministre française de l'Economie, Christine Lagarde, écartant que la France soit "menacée".
"Il faut que tout le monde, et les investisseurs aussi, entendent le message de l'Europe, +nous sauverons l'euro+, c'est un outil qui ne sera pas pris en otage par la spéculation", a renchéri le ministre français du Budget, François Baroin, enfonçant le clou au lendemain de l'annonce d'un plan de secours de 85 milliards d'euros à l'Irlande.
Afin de rassurer les marchés, les membres de l'UE se sont également entendus sur les contours d'un futur Fonds de secours de la zone euro, avec pour ambition de freiner la contagion d'une crise née en Grèce à l'automne 2009 à d'autres pays comme le Portugal ou l'Espagne.
Et pourtant, les marchés ont clairement fait savoir qu'ils n'étaient toujours pas convaincus. Et cela d'autant plus que la Commission européenne s'est montrée lundi plus pessimiste que les gouvernements de Lisbonne et de Madrid concernant les capacités de ces deux pays à réduire leurs déficits publics l'an prochain,
L'euro, très chahuté depuis l'annonce du plan d'aide à l'Irlande, poursuivait lundi en fin d'après-midi une glissade entamée à Tokyo. A 18H00 (17H00 GMT), il valait 1,3088 dollar, passant sous la barre des 1,31 dollar, contre 1,3240 dollar vendredi à 22H00 GMT. Les taux des emprunts d'Etat grecs et irlandais ont certes baissé, mais ceux des emprunts portugais, italiens et espagnols ont fortement augmenté, signe d'une défiance confirmée à l'endroit des pays considérés comme les plus fragiles dans la zone euro. Le Trésor italien a ainsi émis lundi près de 7 milliards d'euros d'obligations sans grande difficulté, mais les taux ont atteint un record depuis un an et demi.
Les principales Bourses européennes étaient toutes orientées à la baisse, clôturant en baisse, autour des 2%. A New York, le Dow Jones était en baisse de 1,2%, touché lui-aussi par la nervosité sur les marchés européens. Seule hausse, à Dublin, qui a terminé à +0,3% après de fortes baisses la semaine dernière.
L'aide internationale, mise au point par l'Union européenne (UE) et le Fonds monétaire international (FMI), consacre 50 milliards d'euros au renflouement de l'Etat celtique, dont le déficit public atteint 32% du Produit intérieur brut (PIB). Les 35 autres milliards d'euros visent à secourir les banques irlandaises, criblées de dettes après l'éclatement d'une bulle immobilière.
L'Irlande devient ainsi le deuxième pays, après la Grèce au printemps dernier, à bénéficier d'une aide internationale.
Celle-ci a été l'objet de vives critiques dans l'île.
Le pays a été "jeté aux égouts", écrit en une l'Irish Daily Mail. A l'image de l'ensemble de la presse, le tabloïde dénonce la contribution que Dublin devra faire au plan international, à hauteur de 17,5 milliards d'euros, en puisant notamment 12,5 milliards d'euros sur le Fonds national de réserve des retraites. Le "petit cochon national est vidé", estime-t-il.
Les Irlandais avalent également difficilement le taux d'intérêt jugé "punitif" du prêt accordé par l'UE: à 5,8%, il est plus élevé que celui exigé à la Grèce au printemps dernier.
Le Premier ministre, Brian Cowen, a assuré dimanche soir qu'il s'agissait du "meilleur accord" que le pays pouvait obtenir, soulignant que Dublin devait actuellement emprunter à des taux encore plus élevés.
Dans ce contexte, le vote du budget de rigueur, présenté le 7 décembre et qui constitue une condition sine qua non du plan international, apparaît plus que menacé.