La Commission européenne a dit mercredi vouloir donner une dimension plus sociale au marché unique de l'UE, après une vague de libéralisations souvent critiquées, en garantissant que les réformes futures ne remettraient pas en cause les droits sociaux collectifs.
Une proposition en ce sens, visant à rassurer les citoyens, a été intégrée dans une liste de suggestions pour faire mieux fonctionner le marché unique, adoptée mercredi par les commissaires à l'issue d'un long débat.
"Ce n'est pas un gros mot, le mot social", a commenté le commissaire européen au Marché intérieur, le Français Michel Barnier, lors d'une conférence de presse.
"Peut-être que le type de croissance, ou d'ouverture parfois mal maîtrisée, qu'on a eu depuis quinze ou vingt ans mérite d'être réorienté", a-t-il reconnu.
"On a vu les dégâts d'une caricature de libéralisme dans les services financiers depuis quinze ou vingt ans. Et les contribuables britanniques, français ou d'autres pays ont payé les conséquences d'un comportement insensé et amoral de certains banquiers qui se sont engouffrés dans ce grand vent d'ultralibéralisme et de dérégulation", a-t-il rappelé.
Baptisée "single market act", la liste de suggestions adoptée par Bruxelles comprend une "clause sociale", une proposition qui a demandé "une longue discussion" mercredi au sein de la Commission où il y a "des sensibilités différentes", a reconnu M. Barnier.
Au final, cette clause "garantit que les droits fondamentaux, et notamment les droits sociaux collectifs, ne seront pas mis en cause par aucune législation s'agissant du marché intérieur", a-t-il expliqué.
Il a affirmé qu'il souhaitait désormais "des libéralisations maîtrisées" et promis "une étude d'impact sociale avant toute proposition de législation".
La Commission compte aussi travailler sur "l'accès, la qualité des services d'intérêt général" et mettre "l'accent sur le dialogue social européen", a-t-il ajouté.
Bruxelles a été beaucoup critiquée ces dernières années par les syndicats pour sa politique jugée trop libérale.
Le feu avait été particulièrement nourri envers la "directive Bolkestein", qui a libéralisé le secteur des services et attisé les craintes de dumping social, personnifiées en France par l'afflux redouté des "plombiers polonais".
Il l'a été aussi au début de la crise financière mondiale quand le prédécesseur de M. Barnier, l'Irlandais Charlie McCreevy, a refusé d'agir en arguant que l'autorégulation des marchés était la meilleure solution.
Dès son entrée en fonctions en début d'année, M. Barnier a prévenu qu'il changerait de cap.
"Le marché unique a été profondément utile pour créer de la croissance et de l'emploi depuis vingt ans. Il a amélioré la vie quotidienne des gens", a-t-il réaffirmé mercredi, évoquant les exemples des baisses des prix des billets d'avion ou des communications mobiles.
Mais il y a "beaucoup trop d'incompréhensions", a-t-il reconnu. "Donc nous devons expliquer, nous devons rassurer, nous devons protéger quand il le faut et donner un certain nombre de garanties."
Le "single market act" compte au total 50 propositions, soumises à une consultation publique jusque février. Les initiatives reprises dans la mouture définitive feront l'objet de propositions législatives de la Commission d'ici fin 2012.