Les dirigeants européens se préparent à des débats animés sur l'opportunité, soutenue par Paris et Berlin, de changer à nouveau le traité de Lisbonne afin de mieux faire fonctionner la zone euro, suite à un accord de principe sur la discipline budgétaire.
Les ministres des Finances de l'UE se sont mis d'accord lundi soir sur un important renforcement des règles qui encadrent la gestion de leurs finances publiques, suite à la crise grecque et de l'euro au printemps.
Le compromis prévoit de nouvelles sanctions financières contre les pays qui à l'avenir afficheront des niveaux de déficits ou de dette trop importants, tels que des dépôts bancaires forcés, des amendes, voire la privation de subventions européenens.
Elles s'appliqueront surtout de manière plus automatique que jusqu'à présent. Un pays rappelé à l'ordre disposera de six mois pour corriger le tir avant d'être puni.
Mais la France et l'Allemagne veulent aussi aller plus loin: elles se sont mises d'accord pour modifier "d'ici à 2013" le traité de Lisbonne, pourtant difficilement ratifié l'an dernier.
Il s'agirait tout d'abord d'introduire des "sanctions politiques" contre les Etats laxistes, telles que des suspensions de droits de vote lors des réunions européennes. Une demande allemande. Puis de pérenniser une forme de Fonds de sauvetage pour les pays de la zone euro qui connaîtraient de graves difficultés financières. Une requête française, cette fois.
Le président français Nicolas Sarkozy a annoncé cet accord à l'issue d'un entretien à Deauville (ouest de la France) avec la chancelière allemande Angela Merkel.
"Maintenant il faut un débat entre les chefs d'Etat et de gouvernement", puisque "l'on passe à des changements de traité", a estimé mardi le ministre des Finances belge Didier Reynders, dont le pays préside l'UE.
La question est délicate car les pays ont gardé un souvenir traumatisant de la dernière initiative en ce sens, avec la ratification très difficile du traité de Lisbonne l'année dernière. En outre, un changement de traité pourrait ouvrir la boîte de Pandore en permettant à certaines capitales de demander d'autres changements institutionnelle en Europe.
Le sujet devrait être abordé lors d'un sommet des dirigeants européens la semaine prochaine à Bruxelles. Mais d'ores et déjà, la discussion promet d'être vive.
D'emblée, le Premier ministre luxembourgeois, Jean-Claude Juncker, également président de l'Eurogroupe, a pris ses distances lundi avec la proposition franco-allemande.
"Pour avoir assisté à tant de révisions des traités, mon goût pour reprendre cet exercice est assez limité", a-t-il déclaré.
De son côté, le Royaume-Uni, réticent à toute perte de souveraineté, a fait savoir qu'il "ne soutiendra pas" un changement du traité européen s'il "implique un transfert de pouvoirs" de Londres à Bruxelles.
Le principal problème pour les Britanniques, qui ne sont pas membres de la zone euro, devrait concerner les sanctions politiques, si elles devaient s'appliquer aux pays de l'ensemble de l'UE.
En fonction des droits de vote considérés, qui diffèrent en fonction des réunion et des domaines, il y aurait, à ce stade, une possibilité pour que le Royaume-Uni soit concerné, relève une source diplomatique.
Toutefois, selon cette source, les Britanniques pourraient se voir promettre une exemption, afin d'éviter qu'ils ne bloquent un éventuel changement de traité, qui requiert l'unanimité des 27 pays de l'UE.
"Il est clair que changer les traités n'est pas une affaire simple. Et il est certain qu'un certain nombre de pays ne se sont pas encore prononcés sur la nécessité d'un changement de traité", reconnaît un diplomate européen de haut rang.