
L'Europe, après les Etats-Unis, a entériné mercredi un vaste projet renforçant la supervision de son secteur financier via la création d'autorités supranationales, afin de tirer les leçons de la crise mondiale qui continue à se faire sentir, en Irlande notamment.
Le Parlement européen, réuni à Strasbourg, a approuvé à une très large majorité ce projet emblématique, discuté depuis plus d'un an et demi.
C'était le dernier feu vert attendu, après celui déjà donné par les ministres européens des Finances le 7 septembre.
Cette réforme jugée cruciale, qui intervient après des décisions similaires prises par les Etats-Unis, doit maintenant entrer en vigueur en janvier prochain.
"C'est un accord historique" et "la première leçon importante tirée de la crise financière", a déclaré devant les eurodéputés le ministre des Finances belge Didier Reynders, dont le pays préside l'UE.
Avec ce vote, "le Parlement européen apporte la preuve que l'UE n'est pas en reste, et qu'elle est aussi un leader dans le processus de réforme (de la finance mondiale) soutenu au G20", a-t-il ajouté.
Le projet va permettre d'"éviter la récurrence des crises sévères, protéger les consommateurs et nourrir la croissance durable", a renchéri le commissaire européen chargé des services financiers, Michel Barnier.
Il a pour objectif de mettre fin à l'émiettement national de la supervision des banques, marchés et compagnies d'assurance en Europe, qui s'est avéré préjudiciable lors de la crise financière de 2008 et 2009.
La réforme prévoit notamment la mise en place d'un "comité européen du risque systémique", sorte de vigie qui avertira les autorités nationales et émettra des recommandations quand il détecte un problème important pour la stabilité générale.
Elle va conduire aussi à la mise en place de trois nouvelles autorités supranationales chargées de surveiller les banques, les assureurs et les marchés, ayant leur mot à dire dans le contrôle du secteur financier des différents pays. Jusqu'ici, cette mission restait pour l'essentiel du ressort national dans l'UE.
La question des pouvoirs à conférer à ces nouvelles autorités a été au coeur des tractations pendant des mois.
La Grande-Bretagne en particulier, soucieuse de préserver les intérêts de la City, a beaucoup résisté face à ce qu'elle considère comme des atteintes à sa souveraineté nationale de la part des futures autorités.
Elle avait réussi, dans un premier compromis trouvé fin 2009 entre Etats, à obtenir des concessions, et notamment à limiter le droit d'intervention de ces nouvelles autorités en cas de crise, lui permettant de contester une décision qui porterait atteinte à sa "souveraineté budgétaire". Dans le cas où il serait demandé par exemple de renflouer une banque.
Le Parlement a notamment obtenu que cette clause ne puise être abusivement utilisée.
La mise en place de cette nouvelle architecture financière marque une étape importante dans les efforts de régulation financière de l'Europe, qui s'efforce de ne pas être en retard sur les Etats-Unis.
Parmi les autres chantiers en cours, les Européens peinent cependant encore à avancer sur un projet visant à mieux réguler les fonds spéculatifs (hedge funds). Des discussions ont repris récemment sur ce sujet entre Etats et Parlement, mais restent difficiles.
Ces réformes apparaissent d'autant plus cruciales que la crise financière continue à se faire sentir en Irlande, en pleine tourmente à cause des graves difficultés du secteur bancaire.
Les inquiétudes des marchés ont redoublé ces derniers jours concernant la solvabilité de ce pays, qui doit renflouer largement ses banques.