Les producteurs de lait ont fait monter la pression lundi sur les industriels en multipliant dans les grandes surfaces les appels à boycotter des produits vedettes comme La vache qui rit, aussi longtemps que leur lait ne leur sera pas payé à un prix "équitable".
Dans la Manche, premier département en nombre de producteurs laitiers, les producteurs ont sévi dans 59 grandes surfaces et poursuivi lundi les opérations désormais quotidiennes consistant à apposer sur certains produits des autocollants appelant à les boycotter, a rapporté Hervé Marie, président de la section lait de Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles (FDSEA).
"Nous avons collé des autocollants +L'entreprise fabriquant ce produit vole les producteurs de lait+ sur tous les produits des groupes Bongrain, Bel et Lactalis", a-t-il déclaré à quelques jours de l'expiration d'un ultimatum fixé par les producteurs aux géants de la transformation laitière.
A Toulouse, une dizaine de manifestants de la FDSEA, des Jeunes Agriculteurs (JA) et la Fédération nationale des producteurs laitiers (FNPL) ont fait de même dans les rayons d'Auchan et de Carrefour avec La vache qui rit, le Caprice des Dieux et le Camembert Président, exutoires symboliques de la colère agricole ces derniers jours.
"BOYCOTTEZ - Ce produit est fabriqué par une entreprise qui ne paye pas les producteurs de lait", "ULTIMATUM - Les agriculteurs demandent à cette marque de payer le lait au prix équitable", proclamaient les stickers.
La vache qui rit est produite par Bel, Caprice des Dieux par Bongrain et le Camembert Président par Lactalis.
En Rhône-Alpes, les producteurs de lait ont fait "des contrôles sporadiques et ponctuels" dans quelques grandes surfaces, avec des affichages sur les linéaires, selon Eric Thébault, responsable de la FRSEA Rhône-Alpes.
Ces opérations surviennent en plein bras de fer entre les producteurs et les géants de la transformation laitière.
Les producteurs accusent Bel, Bongrain et Lactalis de manquer à un accord de juin 2009 et de ne consentir à revoir le prix d'achat du lait que quand les cours baissent, pas quand ils remontent comme c'est le cas actuellement.
Les syndicats majoritaires réclament une hausse moyenne de 3,1 centimes par litre de lait acheté aux producteurs; les industriels refusent et proposent des augmentations bien moindres. Ils arguent de la nécessité de rapprocher les prix français des allemands, qui sont inférieurs et ont entraîné en 2009 une augmentation des importations allemandes.
Les producteurs de la FNSEA, des JA et de la FNPL ont donné aux industriels jusqu'au 12 août pour reprendre les négociations.
Pour Jean Doumeng, secrétaire général de la FNPL pour le Sud-Ouest, le prix payé actuellement aux producteurs "ne permet pas de couvrir l'ensemble des frais de la production". "Il faut dégager un revenu, on ne pourra pas tourner à perte longtemps", a dit à l'AFP cet exploitant de Auterive (Haute-Garonne).
En Midi-Pyrénées, où des actions ont eu lieu également à Montauban, Auch ou Albi, les clients ont pris l'opération avec philosophie. Annabel, au centre commercial Auchan de Toulouse, a ignoré l'appel au boycottage et a choisi entre autres deux produits "stickés": "le beurre préféré" de son fils pour les hamburgers et un fromage à tartiner. "On part en pique-nique et certains produits sont plus faciles", s'excusait-elle.