Le gouvernement socialiste espagnol a approuvé jeudi soir des mesures d'austérité particulièrement impopulaires pour accélérer la réduction de ses déficits, dont une baisse de salaires des fonctionnaires qui ont manifesté dans toute l'Espagne contre cette décision.
Le gouvernement a également revu à la baisse sa prévision de croissance pour 2011, de 1,8% à 1,3% du PIB.
A Madrid, des milliers de fonctionnaires se sont rassemblés à 18H00 (16H00 GMT) devant le ministère de l'Economie, à deux pas de la très touristique Puerta del Sol, dans un vacarme assourdissant de sirènes.
Les centrales syndicales CCOO et UGT, ainsi que le syndicat indépendant CSIF, ont convoqué des rassemblements identiques dans toute l'Espagne, prélude à une grève de la fonction publique le 8 juin.
Les fonctionnaires manifestaient pendant que le gouvernement adoptait un décret-loi regroupant des mesures pour économiser 15 milliards d'euros en 2010 et 2011, afin "d'accélérer le processus" de réduction des déficits publics qui ont explosé à 11,2% du PIB en 2009 et que Madrid veut ramener à 3% en 2013.
Leur salaire vont baisser en moyenne de 5% dès juin. Le chef du gouvernement José Luis Rodriguez Zapatero et ses ministres s'imposent une baisse de salaire de 15%.
Le gouvernement prévoit aussi de geler la revalorisation de certaines retraites pour 2011 ou de supprimer une prime à la naissance de 2.500 euros.
Pressé par les marchés et ses partenaires européens, M. Zapatero, a franchi le Rubicon la semaine dernière en annonçant des coupes sévères dans les dépenses sociales, s'aliénant les syndicats jusqu'alors amis, qui n'excluent pas désormais une grève générale, et une partie de l'opinion publique.
Il avait jusqu'ici refusé tout tour de vis supplémentaire si cela impliquait de tailler dans les dépenses sociales.
Mais il a finalement cédé à la pression des marchés et de ses partenaires européens, dans la foulée de l'annonce du plan massif de soutien aux pays les plus fragiles de la zone euro doté de 750 milliards d'euros.
L'Espagne, confrontée à ses déficits publics et à de faibles perspectives de croissance, passe pour un maillon faible de la zone euro.
Ces mesures d'austérité placent M. Zapatero en grande difficulté politique.
"Ma responsabilité (...) est de penser à l'avenir de mon pays, plus qu'à un quelconque avenir politique et personnel", a déclaré dimanche M. Zapatero, dont la cure d'austérité, qui frappe surtout les classes moyennes, a été interprétée dans les médias comme une forme de suicide politique.
D'autant que les socialistes ne disposent que d'une majorité relative au Parlement, qui devra valider d'ici un mois le décret-loi.
M. Zapatero a jusqu'à présent toujours obtenu, au cas par cas, le soutien des indépendantistes basques ou catalans sur l'économie, qui sont cette fois fort peu enthousiastes.
S'il n'y parvient pas la prochaine fois et qu'il ne rallie pas les votes de la droite au nom de l'intérêt national, il s'exposera à une crise politique, avec éventuelle motion de censure à la clé. A Madrid, certains manifestants scandaient "Zapatero, démission!".
"Nous sommes en train de parler avec les groupes" parlementaires, a déclaré jeudi soir la vice-présidente du gouvernement Maria Teresa Fernandez de la Vega, ajoutant compter sur leur "sens de la responsabilité".
Pour tenter d'apaiser son électorat, M. Zapatero a annoncé mercredi qu'il travaillait à un nouvel impôt pour les plus riches, qui frapperait selon la presse ceux qui possèdent un patrimoine de plus d'un million d'euros.