Un plan de sauvetage financier imposant à la Grèce une cure d'austérité sans précédent a été conclu samedi soir à Athènes, à l'issue d'une journée sous haute tension émaillée d'incidents ayant éclaté au cours de manifestations du 1er mai qui ont mobilisé des milliers de personnes.
L'accord négocié par l'Union européenne, le Fonds monétaire international et la Grèce, permettant le déblocage de 100 à 120 milliards d'euros sur trois ans pour aider le pays à faire face à une dette colossale, a été conclu samedi soir, a dit à l'AFP une source du ministère des Finances.
En contrepartie, ce plan exige du gouvernement grec de nouvelles mesures d'économie draconiennes, par avance dénoncées par les syndicats, qui voulaient faire du 1er mai un premier test des résistances sociales avant une grève générale le 5 mai dans le public et le privé.
Des incidents ont éclaté entre jeunes et forces antiémeutes en marge des défilés à Athènes ainsi qu'à Salonique, la grande ville du nord, où environ 20.000 personnes au total ont manifesté, selon la police.
"C'est l'attaque la plus grave contre les travailleurs depuis des siècles. Ils veulent un retour au XIXe siècle", s'indignait Ericos Finalis, un imprimeur venu manifester. "Cela ne va pas être une bataille, mais une guerre qui va durer pendant des mois, ou même des années".
"Aucun sacrifice, la ploutocratie doit payer pour la crise", proclamait une banderole du front syndical communiste (Pame), dont plusieurs milliers de militants, sous des drapeaux et ballons rouges, étaient rassemblés sur la place Syntagma, dans le centre d'Athènes.
A Salonique, la police a tiré des gaz lacrymogènes pour repousser des groupes de jeunes qui s'en prenaient à des vitrines de banques et de commerces. Des scènes semblables se sont produites dans la capitale.
Les manifestations se sont terminées sans nouveaux incidents.
Face à la gravité de la crise, à la menace d'une contagion à d'autres pays faibles de la zone euro et au risque d'un défaut de paiement de la Grèce, le président français Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel ont réaffirmé samedi leur détermination commune à "agir vite" pour mettre en oeuvre le plan de soutien financier à Athènes.
Ce plan prévoit le déblocage de 45 milliards d'euros la première année, soit 30 milliards de prêts bilatéraux des pays de la zone euro et 15 milliards du FMI. Selon la ministre française de l'Economie, Christine Lagarde, il atteint 100 à 120 milliards d'euros sur trois ans.
Le Premier ministre grec Georges Papandréou doit exposer dimanche matin, en conseil des ministres, les détails de l'accord.
M. Papandréou doit ouvrir à 06H30 GMT (09H30 heure locale) cette réunion par une allocution retransmise en direct par la télévision, pour "annoncer l'accord et en poser le cadre politique", selon des sources gouvernementales.
Le ministre des Finances Georges Papaconstantinou doit ensuite préciser les nouvelles mesures d'austérité exigées par le FMI et les partenaires européens d'Athènes, au cours d'une conférence de presse prévue à 08H30 GMT, avant de partir pour Bruxelles, où le plan d'aide sera discuté pendant une réunion des ministres des Finances de la zone euro convoquée à 14H00 GMT par leur chef de file, Jean-Claude Juncker.
Une fois validé par les ministres, le déclenchement de l'aide doit en principe être autorisé par les chefs d'Etat ou de gouvernement de la zone euro, probablement à l'occasion d'un sommet le 7 ou le 8 mai.
Un projet de loi sur le nouveau plan grec sera déposé en début de semaine au parlement, où le gouvernement socialiste dispose d'une confortable majorité. Selon les médias, il prévoit la suppression de deux mensualités sur 14 pour les salaires de la fonction publique et les retraites dans le public et le privé, ainsi qu'une nouvelle hausse d'un à deux points de la TVA.
Plus gros contributeur du plan d'aide européen (8,4 milliards la première année), l'Allemagne, encore réticente il y a quelques jours, devrait décider du déblocage des fonds vendredi, après aval de son Parlement.
Selon des syndicalistes, les économies exigées pourraient atteindre 25 milliards d'euros en deux ans, pour ramener le déficit public des bas-fonds qu'il a atteints l'an dernier, autour de 14% du produit intérieur brut (PIB), à environ 4% fin 2011. Il s'agirait d'un effort de rigueur sans équivalent dans la zone euro.
Les syndicats se sont dits prêts à batailler contre cette thérapie de choc, notamment contre les coupes salariales envisagées, dont la suppression des 13e et 14e mois de salaire, et la réforme annoncée des retraites.
Le Premier ministre Georges Papandréou a invoqué vendredi la "survie de la nation" pour expliquer des économies "nécessaires" et tenter de faire accepter à ses concitoyens de nouveaux sacrifices.