Plusieurs dizaines d'employés de Cadbury ont manifesté mardi dans le quartier des ministères à Londres pour demander la protection de leurs emplois, à quelques heures de l'annonce probable d'un succès du rachat du confiseur britannique par l'américain Kraft Foods.
Ces employés ont également demandé "une loi Cadbury" qui empêche que des entreprises comme Cadbury puissent être achetées par une société étrangère.
"C'est un jour très triste pour le Royaume-Uni", a commenté Jack Dromey, le vice-secrétaire général du syndicat Unite qui organisait la manifestation. "Un groupe de classe mondiale représentant l'excellence britannique est racheté par une entreprise américaine chargée de dettes", a-t-il ajouté.
"Nous voulons désormais des garanties de Kraft gravées dans le marbre sur l'avenir des employés, et nous voulons que l'Etat s'en porte garant", a ajouté le représentant syndical, ajoutant qu'une telle situation "ne devait jamais se reproduire" : "la loi doit changer pour empêcher des OPA hostiles sur des entreprises britanniques à succès. Nous avons besoin d'une +loi Cadbury+, et nous voulons que Kraft s'asseye dès demain avec les syndicats pour discuter de l'avenir".
La plupart des manifestants portaient des pancartes et des vêtements au logo de Cadbury, voire l'uniforme de l'entreprise, comme Deborah Matthews-Booth, qui a travaillé pendant 33 ans à l'usine de Bournville, près de Birmingham dans le centre du pays, et qui a déclaré se sentir "en deuil". "Tout le monde, des bureaux à la production, craint pour son emploi", a-t-elle dit.
Rob Phillips, qui travaille chez Cadbury depuis 27 ans, a estimé pour sa part "qu'il n'y aurait bientôt plus de secteur manufacturier au Royaume-Uni". "Le gouvernement avait une belle occasion de faire quelque chose et il ne l'a pas fait, ils nous ont laissé tomber, cela ne serait jamais arrivé en France ou en Allemagne", a-t-il estimé.
Le ministre du Commerce Peter Mandelson devait rencontrer mardi soir la direction de Kraft, dont la directrice générale Irene Rosenfeld, pour discuter des projets du groupe américain pour Cadbury.
Le ministère du Commerce a dit "comprendre le sentiment général" au Royaume-Uni vis-à-vis de ce rachat, tout en soulignant que c'était "l'affaire des actionnaires" de Cadbury.
Après quatre mois de siège, Kraft Foods (cafés Jacques Vabre, Grand-Mère, Maxwell, biscuits LU et Oreo, chocolats Milka, Suchard et Côte d'Or...) a fini par faire céder la direction de Cadbury (Carambar, Kréma, La Pie qui chante, les chewing-gums Hollywood et Stimorol, le chocolat Poulain) en lui proposant 13 milliards d'euros, il y a deux semaines.
Les actionnaires de Cadbury avaient jusqu'à la mi-journée mardi pour apporter leurs titres. Kraft, qui a fixé à 50% le seuil de réussite, devait annoncer le résultat dans les heures suivantes. Rien n'a suggéré jusqu'à présent que l'opération pourrait ne pas avoir réussi.
Cadbury, fondée en 1824 et réputée pour ses valeurs et traditions sociales, est l'une des entreprises préférées des Britanniques. Selon une enquête du cabinet Hall & Partners publiée mardi, elle est la deuxième marque la plus populaire au Royaume-Uni, derrière Google et devant Amazon, devançant aussi la BBC, Facebook, Marks & Spencer, Sony, Microsoft, les Jeux Olympiques et les savons Dove.