
A partir du 1er juillet 2010, les particuliers qui ont choisi d'acheter leur électricité auprès d'un concurrent d'EDF ne pourront plus revenir aux tarifs réglementés: une législation que dénoncent les associations, craignent une flambée des prix.
"C'est un mauvais coup porté aux consommateurs", s'exclame Thierry Saniez, délégué général de l'association CLCV.
"Si demain, les particuliers n'ont plus la possibilité de revenir au tarif réglementé, alors il va mourir de sa belle mort et rien n'empêchera des augmentations de prix de 20%", souligne-t-il.
L'immense majorité des ménages (96%) bénéficie aujourd'hui des tarifs réglementés, qui sont proposés exclusivement par EDF et révisés tous les ans par le gouvernement.
Du fait de leur caractère très politique, ces "prix administrés" sont réputés pour leur grande stabilité. En août dernier, le gouvernement avait ainsi limité leur hausse à 2,3% en moyenne, alors que le patron d'EDF réclamait une augmentation de 20% sur trois ans.
C'est le "seul véritable garde-fou contre une envolée des prix", estime la Confédération syndicale des Familles (CSF) dans un communiqué.
Appâtés par les offres commerciales des nouveaux fournisseurs d'énergie, quelque 1,2 millions de foyers se sont néanmoins décidés à franchir le pas en rejoignant un concurrent d'EDF.
Parmi eux, 610.000 ont opté pour GDF Suez, le reste se répartissant entre Direct Energie et Poweo.
Une loi de 2008 leur donnait jusqu'à présent la possibilité de revenir sur leur décision... Mais cette possibilité, appelée "réversibilité", prend officiellement fin le 30 juin prochain.
Si la loi n'est pas modifiée, ces clients pourraient donc être condamnés à payer ad vitam eternam leur facture d'électricité à des prix fixés par le marché.
En outre, ceux qui seraient tentés de quitter les tarifs réglementés aujourd'hui pourraient d'ores et déjà se retrouver "coincés" car il faut rester au moins 6 mois à des prix de marché pour pouvoir revenir chez EDF.
Paradoxalement, les concurrents d'EDF sont plutôt favorables à un prolongement de la réversibilité au-delà du 1er juillet 2010.
"Cela me gêne d'envoyer des commerciaux pousser des foyers à quitter EDF, sans qu'ils aient la garantie de pouvoir y revenir", affirme ainsi Charles Beigbeder, président du fournisseur alternatif Poweo.
"C'est extrêmement anxiogène et, du coup, les ventes sont en train de baisser", ajoute-t-il.
Au diapason des associations de consommateurs, M. Beigbeder milite donc pour qu'une loi soit votée rapidement ou, au minimum, pour que le gouvernement fasse "une déclaration en faveur de la réversibilité".
Il y a un an déjà, le médiateur national de l'Energie, autorité indépendante créée en 2006, s'était lui aussi prononcé publiquement en faveur d'un prolongement de la réversibilité et pour son extension au marché du gaz.
Le sénateur UMP Ladislas Poniatowski a déposé une proposition de loi sur le sujet fin décembre. Mais il doit encore convaincre ses collègues parlementaires de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat.
Initialement, le gouvernement avait prévu de consacrer un article de la loi Nome (Nouvelle organisation du marché de l'électricité) à cette question. Mais il est probable que ce projet, censé stimuler la concurrence sur le marché de l'électricité, ne soit pas adopté avant le 30 juin.
"Il y aura un aménagement pour que ça se poursuive au-delà du mois de juin, soit à travers la loi Nome, soit par un autre biais", a toutefois assuré une source gouvernementale à l'AFP.