Le transport de marchandises dans les grands ports français a été perturbé vendredi par une grève massivement suivie, déclenchée par la CGT qui réclame plus de garanties au gouvernement pour le passage au privé de la manutention, réforme mise à mal par la crise.
Le mouvement a été suivi "à 100%", selon le secrétariat d'Etat aux Transports, qui affirme que sa porte est "toujours ouverte".
La CGT des ports et docks, qui a déjà mené plusieurs grèves sur cette réforme visant à enrayer le déclin des ports français, estime que "le gouvernement a pris des engagements d'investissements, de nouveaux trafics et de 30.000 créations d'emplois mais on ne voit presque rien venir".
Selon Anthony Tetard, secrétaire général adjoint du syndicat, "il y a même des plans sociaux déguisés" dans les établissements portuaires, où seul un départ sur quatre est remplacé.
La loi du 4 juillet 2008 sur la réforme des sept ports autonomes maritimes métropolitains (Marseille, Le Havre, Bordeaux, La Rochelle, Dunkerque, Nantes-Saint-Nazaire, Rouen), rebaptisés "grands ports maritimes", a prévu un changement de leur gouvernance ainsi que le transfert de la totalité de la manutention portuaire -2.000 salariés et les outils- de ces établissements publics vers des opérateurs privés.
Le secrétaire d'Etat Dominique Bussereau a indiqué jeudi qu'il voulait "poursuivre la réforme" en dépit "de la crise économique et de la baisse temporaire du trafic maritime".
Le transfert de l'outillage "devrait être achevé au premier trimestre 2010", a-t-il déclaré à La Tribune, précisant que "les projets stratégiques" des grands ports ont "donné un coup d'accélérateur aux investissements portuaires", avec notamment 174 millions d'euros de subventions supplémentaires de l'Etat d'ici 2013.
La CGT réclame davantage au nom de la crise. "Tous les opérateurs privés négocient a minima pour la reprise des personnels et des outils car ils ont moins de moyens et leurs propres salariés sont en chômage partiel", observe Michel Caizergues, secrétaire du syndicat des dockers de Fos.
A Marseille-Fos vendredi, l'activité marchandises a été totalement paralysée et un terminal pétrolier sur deux a été touché.
Les dockers, qui assurent la manutention sur les quais et sont déjà passés au privé en 1992, craignent eux aussi les conséquences de la réforme. "La restructuration nous pend au bout du nez", a lancé Daniel Manca, de la CGT des dockers de Marseille-Est.
Au Havre, deuxième port par le trafic après Marseille, la manutention sur tous les terminaux à conteneurs, la principale activité du port, était à l'arrêt.
A Nantes Saint-Nazaire, le mouvement a été très largement suivi, selon les syndicats et la direction. Quelque 300 personnes ont participé à une assemblée générale.
A Rouen, la grève a eu un impact "réel" mais "partiel", selon le Grand port maritime, certains opérateurs ayant décalé certaines escales. Une centaine d'agents ont mis en place un barrage filtrant à une entrée de Rouen dans la matinée puis ont brûlé des pneus devant le siège du GPMR.
A Bordeaux, quatre navires sur onze présents dans le port vendredi ont été bloqués.
En outre à Paris, environ 300 agents portuaires, selon la CGT, ont participé à un rassemblement pour dénoncer un projet de décret qui entraînerait la baisse du montant des préretraites des victimes de l'amiante, nombreuses dans les ports.
La CGT fera connaître dans quelques jours les suites qu'elle entend donner à ce mouvement.