L'Union européenne a publié samedi une liste très attendue de près de 4.000 compagnies aériennes dans le monde qui devront réduire leurs émissions de CO2 à partir de 2012 afin d'opérer en Europe, dans le cadre d'un système payant qui reste extrêmement critiqué.
Les émissions polluantes de l'aviation représentent actuellement 3% du total des émissions de CO2 européennes.
Faisant fi de l'opposition de la majorité des pays membres de l'Organisation internationale de l'aviation civile (OACI) et des protestations musclées des compagnies de l'Association internationale du transport aérien (IATA), l'UE s'est dotée unilatéralement en janvier d'une nouvelle loi.
A compter du 1er janvier 2012, elle prévoit que toutes les compagnies aériennes -européennes ou non européennes- opérant dans l'UE devront plafonner leurs émissions de CO2 à 97% d'un niveau annuel de référence (calculé à partir d'une moyenne des années 2004 à 2006).
De plus, les compagnies aériennes devront payer 15% de leurs permis de polluer aux pays européens, dans le cadre d'une bourse d'échange, le reste étant gratuit.
"Le système provoque une tension importante, notamment avec les Etats-Unis", reconnaît une source européenne à Bruxelles. "Mais nous avons toujours dit que nous pourrions l'adapter si un régime international se met en place", ajoute-t-elle.
L'OACI se penchera sur cette question à la mi-octobre, pour éventuellement arrêter une position pour le sommet climatique international de Copenhague.
En attendant, un règlement publié samedi au Journal officiel de l'Union européenne dresse la liste la plus complète possible des exploitants aériens concernés par la loi européenne.
Chaque compagnie se voit assigner dans cette liste un Etat européen, à qui il va devoir détailler dans les prochaines semaines comment il entend calculer ses émissions polluantes. C'est à cet Etat qu'il achètera ultérieurement ses droits à polluer.
Les compagnies aériennes internationales qui ne respecteraient pas certains délais légaux sont menacées d'être fortement pénalisées.
"Nous demandons à nos compagnies membres de coopérer pour se mettre en conformité avec l'UE, même si nous ne sommes pas d'accord avec cette solution purement européenne et appelons à un accord global lors du sommet de Copenhague", précise Quentin Browell, porte-parole de l'IATA.
Tout le processus a toutefois pris du retard, en raison du report de la publication de la liste. Certains pays, comme le Royaume-Uni, ont déjà donné un temps supplémentaire aux compagnies pour l'envoi de leurs plans.
Une liste préliminaire dressée en février a été fortement remaniée et allongée, mais l'IATA décèle toujours certaines "bizarreries".
"Des compagnies comme la néo-zélandaise Air Nelson ou l'américaine Virgin America, qui ne volent pas vers l'Europe, se trouvent sur la liste", ironise M. Browell.
Parfois, une compagnie et sa filiale doivent rendre compte à des pays européens différents. Quant à la France, elle se voit assigner des centaines de compagnies sans noms, relève-t-il.
"Les gouvernements européens doivent faire preuve de bon sens et de flexibilité", insiste-t-il.
Selon un haut responsable européen qui a participé à l'élaboration de la liste, elle ne saurait être définitive car "l'aviation est un secteur qui bouge".
La Commission européenne, soumise à une forte pression, a repoussé à l'automne l'annonce cruciale du plafond des émissions de CO2 qui sera imposé au secteur aérien en 2012.
Selon un document préliminaire, le secteur aérien a émis en moyennne annuelle 216 millions de tonnes de CO2 sur la période de référence de 2004-2006, précise l'IATA. Cela reviendrait à plafonner les émissions polluantes à 210 millions de tonnes en 2012. L'Association juge que ces chiffres sont sous-estimés d'environ 10%.