
Malgré la chute du prix de lait payé aux producteurs depuis 2008, les Français ont continué à payer leurs briques au prix fort, distributeurs et industriels ayant conservé, voire augmenté, leurs marges, montrent deux études commandées par le gouvernement.
Ces études, publiées mercredi, avaient été demandées par Bercy et le ministère de l'Agriculture en pleine crise du lait en juin, en réponse aux interrogations des producteurs sur les marges des distributeurs et des industriels.
Une réunion a eu lieu mercredi à Bercy pour les présenter aux producteurs, industriels, distributeurs et représentants des consommateurs.
La première, réalisée par l'Observatoire des prix et des marges, porte sur le lait, le yaourt nature, le beurre et l'emmental. La seconde, réalisée par la Direction générale de la concurrence, la consommation et la répression des fraudes, se penche sur l'évolution des prix entre janvier 2007 et avril 2009 des produits laitiers de grandes marques et des marques de distributeurs (MDD).
"Ces études montrent que les producteurs et les consommateurs sont trompés", soutient Jean-Bernard Bayard, secrétaire général adjoint de la FNSEA, principal syndicat agricole.
Le gouvernement, lui, n'a pas commenté ces travaux.
L'une des études indique que pour les yaourts, l'emmental et le beurre, les consommateurs ont pu profiter de la baisse des prix payés au producteur à partir de 2008.

Le consommateur paie actuellement 1,79 euro le litre de yaourt, contre 1,93 euro début 2008, 5,48 euros pour le kilo de beurre contre 5,93 en 2008 et 7,39 euros pour l'emmental contre 7,47 auparavant.
En revanche, le lait en brique est pointé du doigt, la chute des prix à la production n'étant pas répercutée aux consommateurs. Le litre de lait au producteur a chuté de moité en 2009 par rapport à 2008, à 25 centimes contre 40. Or le prix de la brique au consommateur est passé de 70 centimes à ... 69.
"Sur les briques de grandes marques, ce sont les industriels qui se sont accaparés la marge, quand la grande distribution n'a pas augmenté les siennes. En revanche, la grande distribution a augmenté ses marges sur les briques de lait MDD", explique Olivier Andrault, responsable de l'alimentation à l'UFC-Que Choisir, membre de l'observatoire.
La marge des industriels dans le prix payé par le consommateur est passée à 52,1% au deuxième trimestre 2009, contre 39,2% fin 2007, juste avant la chute des prix aux producteurs.
"Ce n'est pas en baissant nos tarifs, que nous allons régler les problèmes des producteurs", assure Jéhan Moreau, directeur de la fédération des industries laitières. Ces études ne traduisent pas les difficultés du secteur, "c'est-à-dire les fortes importations de fromages et de lait, un prix au producteur non compétitif et des sociétés de lait qui ne se portent pas bien".
La part de la marge des distributeurs est restée relativement stable sur la même période, s'établissant à 17,1% contre 16,7%.
Pourtant les producteurs estiment qu'elle reste excessive. "Les distributeurs récupèrent une marge importante rien que pour mettre les produits en rayon", soutient M. Bayard.
Cette marge sert également à payer les salariés et les coûts du magasin, répond Jérôme Bédier, président de la fédération des distributeurs, indiquant qu'elle reste inférieure à la marge moyenne sur les autres produits (25%).
L'UFC-Que Choisir relève, elle, que les prix élevés du lait sont également le fait d'une absence de concurrence, deux groupes (Lactalis et Sodiaal) accaparant 75% du marché.