Après une traversée du désert de quinze ans, le Crédit Lyonnais, devenu LCL, tire les bénéfices d'une stratégie de rupture avec un passé encombrant qui l'a relancé sur le plan commercial, même si son succès reste à confirmer.
Après avoir gagné 110.000 clients en 2008, LCL vient d'en dénombrer 34.000 supplémentaires au premier trimestre, presque trois fois plus que la Société Générale.
Une nouvelle dynamique commerciale pour un établissement englué pendant des années dans des déboires financiers retentissants, au point de frôler la faillite, puis qui a connu un positionnement difficile au sein du Crédit Agricole, qui l'a racheté en 2003.
Entre 1993 et 2003, "on peut évaluer à un million le nombre de comptes qu'on a perdus ou qu'on n'a pas ouverts par rapport aux autres réseaux", estime son directeur général Christian Duvillet.
Pour mettre fin à l'hémorragie, le Lyonnais a dû trancher dans le vif. Changer de nom pour commencer, car si la marque était "extrêmement connue", ce n'était "pas forcément pour les bonnes raisons", reconnaît Marie Petracco, responsable de la communication externe.
Devenu LCL en 2005, le Lyonnais se lance dans un plan de modernisation, rationalise son réseau, réduit les niveaux hiérarchiques, bouleverse son offre commerciale. Une mue qui se fait au prix d'une forte réduction d'effectifs (3.500 départs nets).
Porté par une campagne publicitaire télévisée massive autour de célébrités, LCL se présente désormais comme une banque capable de faire "plus" pour ses clients.
"Ils ont eu un peu d'avance sur une tendance consumériste qui s'est nourrie d'une évolution de la société et d'une évolution réglementaire", avec notamment l'arrivée du relevé unique, qui récapitule l'ensemble des frais bancaires, estime Stéphane Court, associé au sein du cabinet de conseil Equinox.
Pour se démarquer, LCL rompt également avec la logique des forfaits bancaires, adoptée par toutes les banques depuis les années 90, en lançant LCL "à la carte", qui permet de bénéficier d'avantages tarifaires tout en ne souscrivant pas systématiquement au même panier de produits.
Le thème de la "juste consommation était complètement en phase avec un discours que les clients avaient envie d'entendre", souligne M. Court.
Trois ans après avoir fait peau neuve, LCL est en phase de "remontée commerciale", assure M. Duvillet, comme en témoigne la progression de son Produit net bancaire (PNB, équivalent du chiffre d'affaires), la plus forte de toutes les grandes banques françaises en 2008.
"C'est surtout du rattrapage", tempère un analyste, rappelant les années noires. "On n'est pas encore au niveau de BNP Paribas", qui a gagné 65.000 clients au premier trimestre.
Pour Eric Delannoy, vice-président du cabinet Weave, le défi de LCL est maintenant de continuer à croître "avec des marges de développement et des leviers de croissance limités".
Seule banque française à réseau national sans activité de marché et sans implantation à l'étranger, LCL ne peut, en effet, compter que sur le marché hexagonal, où 99% des particuliers ont déjà un compte.
"Ils sont condamnés à une fuite en avant de l'innovation", considère M. Delannoy.
Déjà repositionné sur une clientèle urbaine et de moyenne gamme, LCL se lance aujourd'hui vers l'un des rares eldorados de la banque française: les jeunes. "C'est un enjeu pour eux plus encore que pour les autres banques", affirme M. Delannoy.