La 7ème édition du « baromètre des finances solidaires », réalisé chaque année par Finansol, dresse un bilan moins négatif que les circonstances pouvaient le laisser penser. Certes la crise a eu des effets sur une part des encours issus de produits comme les opcvm et l’épargne salariale, qui ont perdu presque 20%, mais cette baisse est compensée par la collecte sur les livrets d’épargne solidaire (+28%) et les actions non cotées (+23%). Conséquence : les encours se sont stabilisés en 2008, s’élevant à 1, 6 milliards d’euros contre 1, 7 milliards en 2007.
Au final, les investissements réalisés dans les activités solidaires s’élèvent pour 2008 à 379 millions d’euros, soit une hausse de 34% en un an. Epargne salariale, fonds solidaires, livrets bancaires ou actions d’entreprises non cotées : ces différents produits ont permis, cette année encore, de financer des entreprises agissant contre l’exclusion.
Les premiers bénéficiaires sont en effet les acteurs du logement (41%), suivi de l’insertion par l’emploi (30%), puis de l’ENVIRONNEMENT (9%), secteur entré récemment dans le champ des finances solidaires mais qui bénéficie des bonnes performances des livrets Codevair des Banques Populaires et du Crédit Coopératif. La solidarité internationale (Microfinance, Commerce équitable) bénéfice de 8% de la collecte ; certains produits financiers (livrets de partage tels que le livret « Agir » du Crédit coopératif, assurances-vie) permettent également de faire un don à des ONG (de l’ordre de 5,7 millions d’euros collectés en 2008).
De manière concrète, cette épargne a permis de loger 1500 familles, de créer 20 000 emplois, de développer des entreprises situées en zone défavorisée, ou encore de lancer une coopérative spécialisée dans la vente de beurre de karité au Burkina Faso… Souvent innovants, cumulant une dimension sociale ou environnementale avec un développement économique, « ces projets n’ont certes pas vocation à devenir déterminants dans la société française, mais ils jouent leur rôle dans des secteurs délaissés par la finance classique », observe François de Witt, président de Finansol. Un rôle limité toutefois par le manque d’encours… car si 300 000 Français ont déjà adopté ce mode d’épargne, les finances solidaires restent mal connues de la population.
Une pratique militante
Certes, leur taux de notoriété s’accroît et de plus en plus de Français se disent prêts à y investir leur épargne, mais, à la différence du commerce équitable, les consommateurs n’ont pas un accès direct au produit et le passage à l’acte reste marginal. Les finances solidaires restent en outre un secteur complexe, avec des acteurs multiples et des produits très divers…Si 7% des Français affirment « avoir souscrit un produit solidaire », « ils ont tendance à faire de la sur-déclaration , en mettant beaucoup de choses derrière ce terme », décrypte Joachim Soetard de l’institut Ipsos. De fait, « l’épargne solidaire reste essentiellement connue des catégories supérieures, habitant en région parisienne et disposant de revenus confortables » ajoute-t-il.
35% des Français affirment toutefois que la crise pourrait les influencer, en leur donnant envie de « prendre en compte d’autres facteurs que le profit dans leur manière d’épargner ». A condition que « les produits solidaires aient le même rendement que les placements classiques », et qu’ils soient « labellisés » ( ce qui est le cas pour 88 placements certifiés par Finansol). Enfin, un grand nombre de personnes interrogées ignorent l’existence même de ces produits, et signalent que leur banquier « ne leur en a pas proposé ».
Le manque d’information et de relai auprès des clients reste en effet un handicap majeur pour ces produits, tant auprès des particuliers que des entreprises, pourtant obligées de souscrire à au moins un Fonds Commun de Placement d’Entreprise Solidaire (FCPES) dans tout plan d’épargne entreprise (PEE). Censée décupler les encours, cette obligation introduite en août 2008 par la loi de modernisation de l’économie devra faire ses preuves. Seules quelques grandes entreprises ont en effet investi une part de l’épargne salariale dans des fonds solidaires à ce jour. Parmi elles, Carrefour représente le tiers de l’encours total.