L'Afrique du Sud, principale puissance économique du continent noir, est entrée en récession pour la première fois en 17 ans, avec une chute vertigineuse de son produit intérieur brut (PIB) de 6,4% au premier trimestre 2009, selon des chiffres publiés mardi.
La récession était attendue, mais l'ampleur de la baisse du PIB a pris de court les milieux d'affaires et accru la pression sur le gouvernement du nouveau président Jacob Zuma, qui a fait de la lutte contre la pauvreté l'une de ses priorités.
Les chiffres publiés par l'office national des statistiques à Pretoria "nous désarçonnent complètement compte tenu de l'ampleur de la chute" du PIB, a déclaré le dirigeant de la chambre de commerce et d'industrie d'Afrique du Sud, Neren Rau, cité par l'agence Sapa.
Les médias locaux avaient tablé sur une contraction du PIB de 3,9% au premier trimestre 2009 par rapport au trimestre précédent.
Pendant les trois derniers mois de 2008, l'Afrique du Sud avait déjà enregistré une croissance négative (-1,8%), pour la première fois en dix ans. Avec deux trimestres consécutifs de croissance négative, la première puissance économique de l'Afrique est donc formellement en récession.
"La situation économique dans le monde s'est détériorée au-delà des attentes (...). Etant donné que nous sommes très dépendants du commerce international, il n'y avait aucune raison que nous puissions échapper" à la crise, a expliqué à l'AFP l'économiste Johan Rossouw.
L'économie sud-africaine repose notamment sur les industries minières et automobiles, qui ont contribué largement ces dernières années à la croissance du pays mais sont touchées aujourd'hui de plein fouet par la crise mondiale.
L'industrie de transformation a enregistré une chute de 3,3% d'un trimestre sur l'autre, et les mines, principal secteur de l'économie du pays, une baisse de 1,7%. Sur un an, l'économie sud-africaine s'est contractée de 1,3%.
"Ce sont des chiffres vraiment horribles", a estimé Dennis Dykes, économiste à la banque sud-africaine Nedbank. "C'est évident qu'il va y avoir encore plus de licenciements", a-t-il prévenu sur la radio 702.FM.
Au cours des derniers mois, les secteurs minier et automobile ont déjà annoncé des dizaines de milliers de suppression d'emplois.
La récession va compliquer la tâche de M. Zuma, qui a été élu président début mai et a promis de combattre un chômage qui frappe 40% de la population active. Ironie du calendrier, la publication des chiffres du PIB a coïncidé avec le début d'une réunion de trois jours du gouvernement sud-africain axée sur les réponses à apporter aux promesses faites pendant la campagne.
Selon les analystes, la contraction du PIB pourrait se poursuivre en 2009 et la croissance ne reprendre vraiment qu'en 2010, année de la Coupe du monde de football organisée en Afrique du Sud.
"Le pire est probablement derrière nous, mais il est possible qu'on enregistre encore une contraction du PIB au deuxième trimestre, et ensuite, avec un peu de chance, la situation va se stabiliser (...) avant une vraie amélioration au cours de l'année 2010 grâce au Mondial", a estimé M. Dykes.
Son collègue Johan Rossouw, qui table aussi sur un retour de la croissance en 2010, a insisté sur l'impact du taux directeur de la Banque centrale, trop élevé pour une grande partie de la population qui ne peut donc accéder à l'emprunt.
Après une série de relèvements destinés à lutter contre une spirale inflationniste, la Banque vient seulement de commencer à relâcher sa politique monétaire. Lors de la prochaine réunion de son comité directeur, jeudi, elle devrait décider d'une nouvelle baisse. Son taux de base est aujourd'hui de 8,5%.