Les producteurs de lait ont manifesté dans plusieurs pays européens lundi contre la chute brutale de leurs prix, pour faire pression sur les ministres de l'Agriculture de l'UE qui sont divisés sur les remèdes à apporter.
En France, où le secteur est en ébullition depuis plusieurs jours, quelque 12.000 d'entre eux ont bloqué les accès de 81 laiteries dans le cadre d'une nouvelle journée nationale de mobilisation. Les producteurs dénoncent une chute de 30% des prix par rapport à l'an dernier.
En Allemagne, plusieurs milliers d'agriculteurs, 6.500 selon les organisateurs et 3.000 selon la police, ont défilé dans le centre de Berlin. Le gouvernement a annoncé dans la foulée une baisse des taxes sur le carburant agricole.
"Les prix du lait sont trop bas, et les coûts sont trop élevés", a déclaré un manifestant, Dieter Bockey.
A Bruxelles, environ 900 agriculteurs selon la police et 2.000 selon les organisateurs, venus principalement d'Allemagne, de France et de Belgique, ont aussi manifesté pour demander l'intervention des pouvoirs publics afin de faire remonter les prix du lait.
Le rassemblement, avec tracteurs et vaches, a donné lieu à quelques échauffourées avec la police lorsque les producteurs de lait ont forcé un barrage qui les empêchait d'approcher le lieu d'une réunion des ministres européens de l'Agriculture.
"La priorité aujourd'hui est qu'il faut baisser les quotas laitiers d'un minimum de 5% et réintroduire de la régulation flexible de la production", a indiqué à l'AFP Erwin Schöpges, responsable belge du syndicat européen des producteurs de lait, le European Milk Board (EMB).
"Beaucoup de producteurs ne peuvent plus tenir avec le prix actuel", a-t-il ajouté.
Cette revendication a été reprise lors de la réunion ministérielle par la France, l'Allemagne et l'Autriche notamment, qui voient dans les hausses de quotas (plafonds de production) décidées dans l'UE une des raisons de la surproduction actuelle et de la chute des prix.
Depuis deux ans, les quotas laitiers augmentent mécaniquement de 1% chaque année avant leur disparition pure et simple prévue fin mars 2015.
Paris et Berlin ont demandé à leurs partenaires de reconsidérer rapidement la situation.
"Je ne me résous pas à voir disparaître les quotas laitiers, sans qu'on ait trouvé un autre système de maîtrise de la production", l'alimentation ne pouvant être laissée "à la seule loi du marché", a déclaré à Bruxelles le ministre français de l'Agriculture Michel Barnier.
"Nous voulons, avant qu'une nouvelle hausse de quota puisse intervenir, examiner si le marché peut ou non l'absorber", lui a fait écho sa collègue allemande Ilse Aigner, "ce qui n'est à l'heure actuelle clairement pas le cas".
L'offensive franco-allemande a été toutefois rejetée par la Commission européenne.
"Les quotas ne sont pas la raison pour les prix bas car nous ne produisons pas plus qu'avant" leur augmentation, a dit lundi la commissaire à l'Agriculture Mariann Fischer Boel.
"C'est simplement une question de demande plus faible", a-t-elle ajouté.
Elle peut compter sur le soutien de pays comme l'Italie ou l'Espagne, qui souhaitent avoir le moins de restrictions possibles à la production en raison d'une forte demande pour leurs produits comme le fromage.
L'avenir des quotas, "ce n'est pas le moment d'en parler", a jugé lundi la ministre espagnole de l'Agriculture, Elena Espinosa.
La Commission européenne envisage seulement quelques mesures ciblées de soutien à la filière, comme un versement anticipé de subventions aux producteurs laitiers.