La France va demander des avancées dans l'UE concernant la régulation des fonds spéculatifs et un assouplissement des normes comptables, deux domaines où l'Europe ne va pas encore assez loin à ses yeux.
"Je pense que l'Europe a été assez exemplaire pour engager le débat dans le cadre du G20 sur la régulation financière", mais "la mise en oeuvre, en particulier la proposition de la Commission sur les hedge funds, me paraît très en deçà des exigences que, nous, les Européens, on devrait avoir", a déclaré mardi la ministre française des Finances Christine Lagarde.
Elle s'exprimait devant des journalistes, en marge d'une réunion des ministres des Finances de l'UE à Bruxelles.
Le commissaire européen chargé des services financiers, Charlie McCreevy, vient de proposer d'obliger les gestionnaires de fonds spéculatifs à demander une autorisation d'exercer en Europe. Les fonds spéculatifs, qui agissent dans une grande opacité, sont dans le collimateur depuis l'éclatement de la crise financière mondiale.
"C'est vraiment de la régulation a minima et il faut qu'on améliore le texte", a souligné Mme Lagarde.
Mme Lagarde critique en particulier le fait que le "passeport européen" donné aux fonds en échange du respect de certaines règles puisse être élargi aux fonds basés en dehors de l'UE après un délai de trois ans.
"Cela me paraît tout à fait inacceptable", a déclaré Mme Lagarde. "Il faut que le passeport ne s'applique qu'à des fonds qui sont gérés non pas à partir de l'Europe mais en Europe".
"Cela ne me convient pas et je pense qu'il faut que l'on resserre le dispositif", a-t-elle encore dit.
Le projet final de Bruxelles, qui peut encore être amendé par les Etats membres de l'UE et les eurodéputés, avait été un peu modifié par rapport à de précédentes moutures, en introduisant notamment ce délai de trois ans. Mais cette amélioration n'est pas jugée satisfaisante côté français.
Interrogée sur la position des autres ministres européens des Finances sur ce sujet, Mme Lagarde a indiqué qu'elle "serait quand même étonnée que les collègues européens ne soient pas à peu près sur la même ligne".
Mais le ministre allemand des Finances Peer Steinbrück, dont le pays s'était montré très critique également vis-à-vis du projet initial de la Commission, s'est montré réservé sur le sujet.
"Dans l'immédiat, nous sommes satisfaits par le fait que la Commission ait au moins présenté quelque chose comme cela", a-t-il dit.
"Il est important que le principe, visant à ce qu'aucun produit financier reste non régulé ou sans surveillance, soit enfin mis en pratique", a-t-il ajouté.
La ministre française des Finances s'est dit par ailleurs "particulièrement frustrée" sur l'assouplissement des normes comptables.
Les Européens l'ont réclamé début avril, alors que l'association qui fixe les normes comptables aux Etats-Unis, le FASB, a assoupli de manière unilatérale les règles d'évaluation des actifs pour soulager les bilans des banques américaines.
Pour bénéficier d'un traitement équivalent, les Européens avaient demandé que l'IASB, l'organisme qui fixe les normes comptables en Europe, soit saisi du sujet, mais sans résultat jusqu'ici.
"On avait demandé à la Commission de se manifester haut, fort et clair vis-à-vis de l'IASB, pour leur demander de se saisir de ce sujet là en particulier. Et il ne se passe rien. Donc je vais me manifester", a souligné Mme Lagarde.