La Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), qui vient d'essuyer les plus grosses pertes de son histoire, va néanmoins gonfler son soutien à une Europe de l'Est rattrapée par la récession et dont la fragilité suscite de plus en plus d'inquiétudes.
L'institution, créée en 1991 pour accompagner les pays de l'ancien bloc soviétique dans leur transition vers l'économie de marché, a dit mercredi avoir enregistré une perte nette de 602 millions d'euros l'an dernier, la première depuis l'exercice 1998, qui avait été plombé par une violente crise financière en Russie.
La BERD a imputé cette perte record à la crise financière et économique internationale, qui a fait fondre la valeur de ses investissements.
La banque, dont le siège est à Londres, intervient dans une trentaine de pays, allant de l'Europe centrale à l'Asie centrale.
Mais malgré cette perte, la BERD a confirmé sa volonté d'augmenter ses investissements de 20% cette année, pour les porter autour de 7 milliards d'euros (ce qui constituera un niveau record). L'objectif est d'aider ses pays d'intervention, qui semblent particulièrement vulnérables à la crise qui secoue l'économie planétaire.
"La sévérité de la crise économique en Europe de l'Est menace près de deux décennies de réformes économiques", a prévenu la banque, qui a affirmé travailler en lien étroit avec d'autres organismes pour aider ces pays à surmonter leurs difficultés.
Il faut dire que les signaux d'alarme se multiplient dans la région, qui a fini par être brutalement rattrapée par la crise financière.
La Berd table elle-même sur une croissance insignifiante des pays de sa zone en 2009 (0,1%), et cette prévision déjà guère brillante cache des situations dramatiques pour certains pays, en particulier l'Ukraine et la Lettonie, dont elle prévoit que les PIB respectifs se contracteront de 5% tous deux.
Elle n'est pas la seule à s'inquiéter pour ces deux pays.
L'agence d'évaluation financière Standard and Poor's (S&P) a abaissé mercredi les notes souveraines de l'Ukraine, en raison de "risques" pesant sur la mise en oeuvre du programme de soutien promis par le Fonds monétaire international.
Mardi, S&P avait fait de même pour la Lettonie, dont elle a rétrogradé la dette dans la catégorie des investissements "spéculatifs", alors que ce pays, en plus de l'effondrement de son activité économique, est en proie à une crise gouvernementale.
La Berd a profité de la présentation de ses résultats pour appeler une nouvelle fois les pays développés à faire plus d'efforts envers sa zone, soulignant que les problèmes de l'Est ne manqueraient pas de se répercuter à l'Ouest, comme l'illustre la dégringolade boursière des banques ouest-européennes les plus exposées à l'ex-bloc soviétique.
"Les problèmes de la région sont fortement interdépendants de ceux du reste de l'Europe, et la solution réside dans une réponse coordonnée des autorités publiques et des institutions financières internationales", a plaidé Thomas Mirow, un ancien secrétaire d'Etat allemand aux Finances qui a succédé en juin au français Jean Lemierre à la tête de la BERD.
La semaine dernière encore, M. Mirow avait appelé les Etats occidentaux à faire preuve de solidarité à l'égard de leurs cousins de l'Est, et souligné le danger d'une attitude de "chacun pour soi", dans une tribune publiée dans le Wall Street Journal.