La France a détruit en 2008 beaucoup plus d'emplois salariés, notamment précaires, qu'elle n'en a créé, accusant le plus fort recul depuis 14 ans, mais 2009 risque d'être pire avec la plongée dans la récession.
"On rentre dans un processus récessif. 2007 a connu beaucoup de créations d'emplois, 2008 est l'année du retournement, 2009 sera marquée par des destructions d'emplois toute l'année, aux alentous de 300.000. L'horizon est noir pour tout 2009", a déclaré à l'AFP l'économiste Mathieu Plane (OFCE).
Après plus de 300.000 créations d'emplois salariés en 2007, un dynamisme inédit depuis l'an 2000, le retournement reflète la contraction de l'activité mais se trouve accentué par la flexibilité du marché du travail.
L'emploi salarié dans le secteur concurrentiel a reculé de 0,7% en 2008, soit 115.300 postes en moins, selon des données provisoires diffusées vendredi par le ministère de l'Emploi. La France comptait donc moins de 16 millions de salariés fin décembre.
Après un premier trimestre 2008 encore créateur d'emplois, les trois autres trimestres se sont soldés par des destructions de postes, de plus en plus importantes au fil du temps. Au quatrième trimestre 2008, les destructions d'emploi ont atteint 88.700 (-0,6%), niveau le plus élevé depuis 15 ans.
L'économie a subi un violent coup d'arrêt au quatrième trimestre 2008 avec une chute de 1,2% de son produit intérieur brut (PIB), la plus forte depuis 1974. La croissance dans l'année s'en est trouvée ramenée à +0,7%.
Tous les secteurs ont accusé le coup en matière d'emploi.
Les créations d'emploi n'ont augmenté que de 1,7% dans la construction, réduites à 25.400 postes, mais ont été nulles au quatrième trimestre dans ce secteur qui tirait l'emploi depuis quatre ans.
Dans l'industrie, l'hémorragie entamée depuis sept ans s'est accélérée: les effectifs ont reculé de 2,2% comparé à 2007, avec 81.500 emplois en moins. Rien qu'au dernier trimestre, près de 39.000 postes y ont été détruits, affectant souvent des salariés âgés et peu qualifiés et illustrant l'érosion d'un modèle de salariat fait de contrats de travail durables et à temps complet.
Les services ont accusé une baisse d'effectifs de 0,5% à la fois pendant le dernier trimestre (-50.000 postes) et en douze mois (-59.300).
Les nombreux emplois d'intérimaires se rangent dans la catégorie tertiaire, même quand il s'agit de missions d'intérim dans l'industrie ou le bâtiment.
Or l'intérim, souvent considéré comme un indicateur des évolutions futures de l'emploi, s'est effondré, chutant de 21,2% pendant l'année (-139.100 postes) et de 12,9% au cours du dernier trimestre (-76.700).
"L'ajustement de l'emploi a été plus rapide, les entreprises ne semblent pas avoir attendu confirmation du retournement conjoncturel. C'est dû notamment à la précarisation et à la flexibilisation du marché du travail ces 10 dernières années avec un recours plus fort à l'intérim et aux CDD courts -les CDD de moins d'un mois représentaient 57% des intentions d'embauche en 2008 contre 35% en 2000", selon M. Plane.
Mais, après les précaires et les salariés au chômage technique, "cela va commencer à taper dans le dur en 2009, avec des licenciements et du chômage tout court", a-t-il prévenu.
Or les destructions d'emploi entretiennent la mécanique récessive, soulignent les économistes. Les Français se retrouvant au chômage auront moins de pouvoir d'achat, consommeront moins, accentuant encore la contraction de l'activité.