
L'incertitude grandit à nouveau sur l'avenir de la banque belgo-néerlandaise Fortis, dont le premier actionnaire, le groupe chinois Ping An, refuse d'avaliser un plan de sauvetage passant par la vente des principales activités à BNP Paribas et aux Pays-Bas.
L'assureur Ping An, qui détient quelque 5% de Fortis, a annoncé dimanche qu'il avait "l'intention de voter contre la vente d'actifs de Fortis", lors d'une assemblée générale cruciale du groupe à Bruxelles mercredi, mettant à exécution une menace qu'il avait exprimé ces derniers jours.
Cette décision risque d'avoir un impact décisif. Les avocats des petits actionnaires, qui disent représenter au total au moins 10% du capital, conseillent également de dire "non".
Malgré tout, le gouvernement belge, qui a négocié le plan de sauvetage et de démantèlement du groupe, reste ferme. Le Premier ministre Herman Van Rompuy a exclu une renégociation d'ici mercredi.
"Le gouvernement a approuvé un accord renégocié sur Fortis et ce sera cet accord qui sera soumis à l'assemblée générale" à Bruxelles, a dit son porte-parole dimanche.
Concrètement, les actionnaires vont voter sur trois opérations décidées début octobre: la nationalisation par l'Etat néerlandais de l'essentiel des activités aux Pays-Bas; la nationalisation par la Belgique de Fortis Banque, première banque du pays; et la revente de 75% de cette dernière à BNP Paribas.

Selon les quotidiens belges De Tijd et L'Echo, Fortis se prépare déjà au pire et travaille sur un "plan B" en cas de refus par les actionnaires.
Le but: assurer à Fortis Banque les liquidités nécessaires si elle se voyait refuser l'accès à des prêts d'autres banques. Elle aurait besoin de 30 à 40 milliards d'euros par jour, selon les deux journaux.
Un plan de communication serait également en préparation pour éviter une ruée des épargnants sur les agences bancaires.
"Si, au bout du compte, les choses ne se débloquent pas rapidement, BNP Paribas sortira du paysage", a prévenu de son côté le directeur général du groupe français Baudouin Prot.
Les déboires de l'ancien fleuron de la finance belgo-néerlandaise durent depuis plus de quatre mois. Le groupe a été parmi les premières banques européennes à être atteintes par la crise financière déclenchée en septembre 2008 aux Etats-Unis.
Un Premier ministre belge, Yves Leterme, en a même fait les frais, contraint à la démission en décembre après avoir été accusé de pression sur la justice pour qu'elle avalise ses projets sur Fortis.
L'Etat belge a dû entre-temps sous la pression renégocier le premier accord conclu avec BNP. Le groupe français a accepté finalement de se contenter de 10% des activités d'assurance de Fortis en Belgique, contre 100% prévus en octobre. La holding cotée en Bourse conservera la différence, et gardera aussi moins d'actifs à risque que prévu.
Une cascade de recours judiciaires est encore à prévoir.
Fortis a prévenu que même après un vote négatif, les transactions prévues par les accords d'octobre "ne pourraient être dénouées que moyennant l'accord des parties ou par une décision judiciaire au fond déclarant nulles ces opérations".
S'ils veulent annuler le démantèlement, les petits actionnaires doivent s'attendre à retourner devant les tribunaux.
BNP et les Etats pourraient aussi poursuivre Fortis pour obtenir l'exécution forcée des accords d'octobre, ou réclamer des dommages-intérêts.