Pour la première fois depuis 25 ans, la demande mondiale de pétrole devrait avoir baissé en 2008, selon l'Agence internationale de l'énergie, alors que l'Opep devrait prochainement annoncer une réduction de sa production.
"Pour la première fois depuis 1983", la demande mondiale devrait se contracter en 2008, cédant 0,2 million de barils par jour (mbj) pour tomber à 85,8 mbj, écrit l'AIE, qui a de nouveau taillé drastiquement dans ses prévisions dans son rapport mensuel jeudi.
"En 2009 la demande devrait recommencer à croître, à 86,3 mbj", ajoute l'AIE, qui se fonde sur la reprise attendue l'an prochain par le Fonds monétaire international (FMI). L'agence admet cependant qu'en cas de récession "prolongée et mondiale", ce rebond de la demande "pourrait ne pas se matérialiser".
L'agence gouvernementale américaine d'information sur l'énergie (EIA) avait annoncé mardi qu'elle tablait elle aussi sur une contraction de la demande en 2008 mais aussi en 2009.
En réponse à cette baisse de la demande, les producteurs commencent à ajuster leur offre.
L'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), qui représente 40% de l'approvisionnement planétaire, a retiré à elle seule 760.000 bj du marché, son offre atteignant 31,3 mbj fin novembre. Mais la baisse de production de 1,5 mbj annoncée fin octobre par le cartel n'est encore appliquée qu'à 55%.
Les pays du Golfe, Arabie saoudite en tête, ont le mieux respecté les consignes, l'Equateur, le Venezuela, la Libye et l'Iran le moins alors que ce sont les pays qui ont demandé avec le plus d'insistance de couper la production ces derniers mois.
Conséquence de la baisse de production, l'Opep a augmenté sa capacité excédentaire, qui lui permet de pomper rapidement plus de brut si besoin: elle est désormais de 3,3 mbj, un record depuis 6 ans.
D'autant que l'Opep se dirige vers une nouvelle baisse de ses quotas, la troisième depuis septembre, lors de sa réunion d'Oran (Algérie) le 17 décembre.
"Le marché est très baissier" en raison de la chute de consommation dans les pays riches, admet David Fyfe, chef analyste de l'AIE, mais "l'Opep risque d'aller trop loin", car "la demande pourrait se montrer plus résistante que prévu dans les pays émergents".
Le cartel, confronté à la chute de la demande d'or noir en raison de la crise économique et financière, tente à tout prix de faire remonter les prix du baril de brut, qui ont fondu de plus de 100 dollars depuis leur record de 147,50 dollars en juillet.
Le roi Abdallah d'Arabie, premier pays producteur au monde, a indiqué le mois dernier qu'il souhaitait voir les prix rebondir à 75 dollars le baril.
Les analystes s'attendent à ce que le cartel retire 1 à 3 millions de barils par jour du marché. Trop pour l'AIE, qui appelle l'Opep à maintenir son offre à 30,7 mbj l'an prochain, au risque de voir "les stocks commencer à reculer", justifie David Fyfe.
Les stocks pétroliers de l'Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) sont toutefois en augmentation et représentent 56,8 jours de consommation, "bien au-dessus de la moyenne des 5 dernières années", note le rapport.
L'Opep a d'ailleurs indiqué qu'elle souhaitait les voir retomber à 52-53 jours de consommation.
David Fyfe relativise par ailleurs l'intention affichée par la Russie de baisser son offre de concert avec l'Opep pour soutenir les cours: "la production russe baisse de toutes façons".