Les autorités américaines ont de nouveau été contraintes de jouer les pompiers pour une institution financière, cette fois l'ex-numéro un mondial de la banque Citigroup, en utilisant une nouvelle forme d'intervention, la garantie sur les actifs.
Face au pire des scénarii, celui d'une nouvelle faillite chez les banques américaines, potentiellement aussi retentissante que celle de Lehman Brothers deux mois auparavant, l'Etat américain n'a pas eu d'autre choix que de monter un plan de sauvetage en urgence.
"Peu m'importe comment on appelle cela mais Citigroup reconnaît de facto qu'il n'avait pas les ressources pour survivre seul sans aide de l'Etat", a commenté John Jansen, économiste et ancien de la Réserve fédérale de New York.
Le Trésor a d'une part utilisé un outil devenu maintenant classique: la recapitalisation, en injectant 20 milliards de dollars dans la banque contre des actions préférentielles. Ce montant vient en plus des 25 milliards déjà injectés de la même manière début novembre mais n'avaient pas calmé les craintes du marché sur la viabilité du groupe.
Ces 20 milliards représentent le tiers de ce qu'il restait au secrétaire au Trésor Henry Paulson pour parer aux coups durs, s'il respecte son engagement, pris le 18 novembre, de se limiter à 350 milliards de dollars de dépenses sur les 700 milliards qu'avait accordés le Congrès.
La deuxième partie du plan, "une protection contre la possibilité de pertes importantes et inhabituelles d'un ensemble d'actifs d'une valeur de 306 milliards de dollars", a retenu l'attention.
Il s'agit là d'actifs invendables de la banque, qui représentent une masse particulièrement encombrante dans son bilan. Or cette annonce du Trésor vient une dizaine de jours après qu'il eut abandonné son intention de racheter ces actifs douteux.
Citigroup était vu comme le géant bancaire qui aurait profité le plus de ces rachats.
"Cette nouvelle initiative montre que l'Etat américain va faire tout ce qui est nécessaire pour éviter la faillite d'une grosse institution", a commenté Marie-Pierre Ripert, de Natixis.
Il va en effet payer le prix fort, épongeant le gros des pertes de Citigroup sur son portefeuille d'actifs "toxiques": 90%, au-delà des 29 premiers milliards de dollars. Le Trésor serait en première ligne (5 milliards), puis viendrait l'agence fédérale de garantie des dépôts bancaires FDIC (10 milliards suivants), et enfin la Réserve fédérale... sans limite fixée à ce jour.
Seule exigence qu'il ait eue, l'Etat percevra un dividende annuel élevé (8% sur ses actions préférentielles), tandis que les autres actionnaires n'en recevront presque aucun (0,01 dollar maximum par action commune).
Mais selon l'économiste et ancien secrétaire américain au Travail Robert Reich, "ce n'est pas une transaction particulièrement bonne pour les contribuables américains", en revanche "c'est un accord merveilleux pour Citi".
Le groupe garde ces actifs dans son bilan, la majeure partie du risque qui y est associé incombant aux pouvoirs publics.
Et contrairement à ce qu'il avait fait pour l'assureur AIG, dont le PDG avait été débarqué après seulement trois mois de présence, l'Etat américain n'a pas demandé de changement de direction. Le PDG Vikram Pandit, en place depuis un an, a sauvé son poste.
L'administration du président George W. Bush, au pouvoir jusqu'au 20 janvier, a de plus laissé ouverte la porte à d'autres sauvetages. Une manière de dire que celui de Citigroup ne serait probablement pas le dernier.
"Nous avons pris ce genre de décisions par le passé, nous en avons pris une hier soir, et, si nécessaire, nous prendrons ce genre de décisions à l'avenir pour sauvegarder notre système financier", a affirmé M. Bush.