
La récession en Europe se fait lourdement sentir sur le secteur automobile, qui voit ses ventes chuter et multiplie les appels à l'aide en direction des pouvoirs publics.
"Nous n'avons jamais connu une crise aussi grave", a reconnu vendredi le patron du constructeur allemand Daimler, Dieter Zetsche, "cela n'a pas de sens de produire des voitures pour les laisser au parking".
L'Association des constructeurs automobiles européens (ACEA) a annoncé un plongeon de 14,5% sur un an des ventes de voitures neuves en octobre, à 1,134 million, après des chutes déjà de 8,2% en septembre et 15,6% en août. Ces chiffres recouvrent 28 pays: les 27 membres de l'UE, moins Chypre et Malte, mais en ajoutant l'Islande, la Norvège et la Suisse. Sur les dix premiers mois de l'année, le recul se chiffre à 5,4% avec 12,85 millions de véhicules immatriculés.
"Reflétant la crise financière et économique, le nombre d'immatriculations de voitures recule maintenant depuis six mois consécutifs, et de manière plus notable depuis l'été", souligne l'ACEA. Le secteur souffre du ralentissement économique, des difficultés pour obtenir des crédits en pleine crise financière et des carburants chers, malgré la baisse toute récente des prix à la pompe. Et l'entrée en récession désormais officielle de la zone euro ne va rien arranger.
Christian Streiff, patron du groupe français PSA Peugeot Citroën et président de l'ACEA, a prévenu fin octobre que la baisse des ventes, déjà d'environ 10% au troisième trimestre, serait de "probablement beaucoup plus (importante) au quatrième trimestre". La plupart des grands constructeurs européens ont décidé de réduire fortement leur production, avec des arrêts d'usines et du chômage technique autour de Noël.
Mais ils commencent aussi à supprimer des emplois.Le suédois Volvo Cars en a annoncé 6.000 depuis juin. Son compatriote le groupe Volvo (poids lourds, moteurs) en est à 3.750 depuis fin septembre, dont 900 cette semaine. Et en Espagne, Nissan a annoncé cette semaine 1.680 licenciements. La crise gagne aussi les sous-traitants, fabricants de pneus ou de moteurs, ou le secteur de l'acier qui réduit lui aussi massivement sa production.
Le marché automobile européen n'est pas plus touché par la crise que le Japon ou les Etats-Unis, où General Motors est au bord de la faillite. Mais les constructeurs européens craignent d'être désavantagés face aux concurrents américains, qui se sont vu promettre 25 milliards de dollars de prêts à taux réduits.
Les prêts doivent encore être concrétisés, mais le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a indiqué vendredi que l'UE saisirait l'OMC concernant le plan américain "si c'est une aide d'Etat illégale". L'ACEA a aussi réclamé 40 milliards d'euros de prêts à taux réduits pour financer le développement de véhicules plus verts.
Les constructeurs réclament aussi des primes à la casse ou des incitations fiscales, pour encourager les consommateurs à changer de voiture.
L'Allemagne, sollicitée notamment par Opel et Ford, veut exonérer de taxe annuelle sur les véhicules, pour une durée limitée, les voitures neuves qui seraient achetées au premier semestre 2009. Mais le plan est moins ambitieux qu'espéré.
La crise pourrait toutefois apporter une chose positive aux constructeurs: la réduction des objectifs controversés que Bruxelles veut leur imposer pour lutter contre le réchauffement climatique. Les gouvernements européens se sont entendus début novembre pour leur accorder trois ans supplémentaires, jusque 2015, pour réduire la pollution des voitures. Le Parlement doit encore donner son accord.