
Début de récession dès cette année, croissance quasi-nulle en 2009, hausse du chômage et dérapage des déficits: l'Europe doit s'attendre à présent, selon Bruxelles, à une vraie crise économique, face à laquelle les gouvernements entendent réagir par des mesures de soutien ciblées.
"L'horizon économique s'est maintenant significativement assombri" avec la crise financière, a estimé lundi le commissaire européen aux Affaires économiques Joaquin Almunia, en publiant des prévisions de conjoncture particulièrement moroses.
Selon la Commission, les quinze pays de la zone euro sont d'ores et déjà entrés en récession technique, caractérisée par au moins deux trimestres de recul de leur Produit intérieur brut (PIB), une première depuis la création de la monnaie unique en 1999.
Elle prévoit en effet un recul de son PIB de 0,1% au troisième trimestre par rapport au précédent, puis de 0,1% au quatrième, après une baisse déjà de 0,2% au deuxième.
Cette récession technique devrait aussi toucher l'ensemble de l'Union européenne, avec un recul du PIB aux troisième et quatrième trimestres.
Au final, la croissance devrait encore résister sur l'ensemble de l'année 2008, avec 1,2% en moyenne dans la zone euro. Mais l'année 2009 s'annonce très difficile avec une croissance au point mort, tant dans la zone euro (+0,1%) que dans l'UE (+0,2%). Un risque de véritable récession en 2009 (recul du PIB sur l'ensemble de l'année) n'est donc pas écarté.
La zone euro va au devant de sa pire performance en matière de croissance depuis sa création, même si la situation devrait ensuite s'améliorer avec 0,9% en 2010.

"Nous allons avoir une année très problématique", a reconnu le ministre allemand des Finances Peer Steinbrück, en arrivant une réunion avec ses homologues de la zone euro, consacrée aux moyens de faire face à cette détérioration.
Les principales économies européennes vont être durement affectées. L'Allemagne, la France, l'Italie, le Royaume-Uni, et l'Espagne devraient tous connaître une récession technique en 2008.
En 2009, le Royaume-Uni et l'Espagne devraient enregistrer un recul de leur PIB sur l'ensemble de l'année, tandis que la France, l'Allemagne et l'Italie devraient connaître une stagnation.
Conséquence de ce ralentissement généralisé: la Commission européenne s'attend à un progression de deux millions du nombre de chômeurs entre 2008 et 2010.
Les déficits sont aussi appelés à se creuser. Sept pays de l'Union européenne, à commencer par l'Irlande, mais aussi la France qui préside actuellement l'UE, devraient dépasser à partir de 2009 la limite européenne autorisée pour le déficit public, de 3% du PIB.
Toutefois, Bruxelles a déjà promis de faire preuve de souplesse, dans le cadre du Pacte de stabilité européen, compte tenu de la gravité de la crise financière.
Et les ministres des Finances de la zone euro sont tombés d'accord dans la soirée pour renoncer, du fait de la crise, à l'objectif qu'ils s'étaient fixés d'un retour à l'équilibre de leurs comptes publics en 2010 au plus tard, a annoncé leur chef de file, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker.
Les gouvernements réfléchissent à présent à des mesures pour atténuer le ralentissement économique. M. Juncker a indiqué que les ministres des Finances avaient rejeté l'idée d'un plan de relance généralisé face au risque de récession. Mais ils sont prêts à prendre des mesures "ciblées" et "conséquentes" de soutien à l'activité, a-t-il dit.
L'effort doit porter en particulier sur "le niveau d'investissement public", a-t-il précisé.
En revanche, le président de l'Eurogroupe a fermement rejeté l'idée française de réunions régulières des chefs d'Etat des pays utilisant la monnaie unique, pour créer un véritable gouvernement économique européen.