Face au ralentissement économique mondial et à la crise financière qui pèsent sur la santé des compagnies aériennes, l'européen Airbus a préféré jouer la prudence mercredi, en suspendant pour l'instant la montée en cadence de sa production d'avions.
Airbus a ainsi renoncé pour le moment à son objectif de faire sortir de ses usines chaque mois, en 2010, 40 appareils de la famille des moyen-courriers A320. Il va finalement laisser inchangées les cadences à 36, tout en se réservant la possibilité de les augmenter à nouveau en 2009 si la situation du marché s'améliorait, a précisé un porte-parole du groupe, filiale de l'européen EADS.
Les moyen-courriers, transportant en fonction de leur aménagement entre 100 et 200 passagers, sont les avions les plus vendus d'Airbus et ils constituent par conséquent un excellent baromètre de ses ambitions.
"C'est une décision prudente qui fait suite à notre vision actuelle du marché", a déclaré le patron d'Airbus, Thomas Enders, dans une déclaration lue par le porte-parole à l'AFP.
"Nous allons continuer à surveiller les marchés et nous préservons notre capacité à agir en même temps", a-t-il ajouté.
En ce qui concerne la famille des long-courriers A330-A340, l'avionneur maintient son objectif pour 2010 d'augmenter la production à 10 avions par mois, contre 8 actuellement. En revanche, le but de passer à 11 en 2011 est pour l'instant gelé.
Pour l'ensemble de 2008, Airbus avait prévu de livrer plus de 470 avions, toutes familles confondues. Il n'avait pas donné de prévisions d'ensemble pour les années suivantes.
La décision d'Airbus de ne pas augmenter la production "est une excellente nouvelle. C'est une sage décision. Il anticipe des annulations et des reports de commandes des compagnies aériennes", a estimé un analyste français.
En effet, de nombreux transporteurs, confrontés à la récente envolée du prix du carburant et à la contraction du trafic due à l'atonie de la croissance économique, traversent une zone de turbulence. Selon de récentes prévisions de l'assureur-crédit Euler Hermes, le trafic aérien de passagers ne devrait croître que de 3,5% cette année et seulement de 1% l'an prochain, bien en deçà de sa croissance à long terme, évaluée à 4,5% l'an.
Et avec la crise du crédit, beaucoup de compagnies vont rencontrer des difficultés pour financer l'achat d'avions, dont les prix varient entre 50 et 330 millions de dollars, dans les catalogues des deux constructeurs aéronautiques, Airbus et l'américain Boeing. Même en période de pleine croissance, il est très rare qu'un transporteur paye au comptant ses avions.
"Si Airbus n'avait pas pris cette décision, il risquait la surproduction en 2009", a observé l'analyste français.
Son rival Boeing n'a pour l'instant pas fait d'annonce aussi concrète. Au cours d'une conférence de presse mardi à Paris, le vice-président du marketing de la division avions civils du constructeur américain, Randy Tinseth, avait toutefois indiqué que son groupe examinait avec beaucoup d'attention les cadences de sa production, compte tenu de la situation économique.
Il s'était refusé à divulguer des détails sur les livraisons, renvoyant au 22 octobre, date à laquelle le groupe doit présenter ses résultats sur neuf mois. Le 23 juillet dernier, Boeing avait déclaré tabler sur 475-480 livraisons en 2008 et 500-505 en 2009.
Sur les neuf premiers mois de 2008, il a livré 325 avions, dont seulement 84 au troisième trimestre, plombé par la grève de ses ouvriers mécaniciens depuis le 6 septembre.