La ministre de l'Economie, Christine Lagarde, a pris acte lundi du fort ralentissement de l'économie française en révisant drastiquement à la baisse sa prévision de croissance pour l'an prochain, sans attendre la présentation du budget 2009 vendredi.
Après avoir reconnu dimanche que la croissance serait "molle" en 2009, la ministre l'a estimée "autour de 1%", comme en 2008.
Cette nouvelle prévision marque un changement de ton du gouvernement, qui tablait jusqu'ici sur une croissance du PIB de 1,75 à 2,25%.
"Jusqu'à présent, Christine Lagarde était optimiste, mais peu crédible", commente Nicolas Bouzou, économiste au cabinet Asterès, jugeant "bienvenue" cette remise à plat.
"Le gouvernement prend acte du ralentissement économique mondial en se montrant plus réaliste", renchérit Jean-Christophe Caffet, analyste chez Natixis.
La ministre pense toutefois que la fin de 2009 sera "certainement meilleure que le début de l'année".
"Alors que les entreprises sont actuellement tétanisées par l'ampleur de la crise financière, on peut espérer qu'elles se remettront à investir au second semestre 2009", une fois passé le gros de cette crise, estime Nicolas Bouzou.
Quant aux ménages, "la baisse des prix observée actuellement grâce au reflux des cours du pétrole devrait permettre un retour progressif de la consommation", selon lui.
Reste que l'amélioration attendue dans le courant de l'année prochaine, sera "relativement modeste", poursuit l'économiste.
Et que le ralentissement de la croissance complique considérablement l'élaboration du prochain budget, qui doit être présenté vendredi en Conseil des ministres.
La dégradation de la conjoncture devrait en effet aggraver le déficit public, que le gouvernement espérait initialement ramener à 2,5% du PIB en 2008 puis 2% en 2009, avant un retour à l'équilibre en 2012.
Plusieurs experts anticipent désormais un déficit proche de 2,7% du PIB en 2008, ce que ne dément pas Bercy.
"Les conditions sont très adverses", souligne-t-on dans l'entourage de Christine Lagarde. "Avec une croissance qui ralentit, il y aura un effet sur le déficit, mais il va être très amorti par les réformes structurelles que nous menons", fait-on valoir au ministère.
Le déficit ne dépassera pas la limite de 3% du PIB autorisée par Bruxelles, "car on est en train de serrer les boulons partout où c'est possible", explique-t-on à Bercy.
Le gouvernement table notamment sur la Révision générale des politiques publiques (RGPP), qui doit permettre d'économiser 7 milliards d'euros d'ici 2011. "Mais la réforme mettra du temps à produire ses effets", prévient Nicolas Bouzou.
Bercy va aussi bénéficier de la récente décision des pays de la zone euro, qui ont autorisé une détérioration des déficits si celle-ci provient d'une baisse des recettes fiscales liée au ralentissement économique et non pas d'une augmentation de la dépense publique.
Mais la hausse attendue des taux d'intérêt fera parallèlement gonfler la charge de la dette de l'Etat, réduisant d'autant ses marges de manoeuvre.
Et la croissance en berne a déjà entraîné une perte de recettes fiscales évaluées à 5 milliards d'euros en 2008.
En 2009, "le déficit de l'Etat va se creuser sous l'effet du paquet fiscal (13 mds d'euros en année pleine) et de moindres recettes", prédit Jean-Christophe Caffet.
Selon l'économiste, "la baisse de la consommation fera baisser les recettes de TVA et la crise financière grèvera l'impôt sur les sociétés, jusqu'ici dopé par les profits des pétrolières, des banques et des compagnies d'assurance".