Le Trésor américain a annoncé mercredi qu'il allait s'endetter davantage pour aider la Réserve fédérale dans ses mesures de soutien à l'économie, après avoir répété à l'envi pendant dix jours qu'il veillerait à protéger au mieux les intérêts des contribuables.
Le ministère a ainsi lancé un "programme de financement complémentaire" qui "consistera en une série de bons du Trésor distincts de ceux du programme d'emprunt actuel du Trésor et qui fourniront l'argent frais nécessaire aux initiatives de la Réserve fédérale".
La première tranche de ce programme a commencé dès mercredi par le biais d'une adjudication de 40 milliards de dollars de bons du Trésor à maturité de 35 jours.
Le Trésor n'a eu aucun mal à placer ces titres, en raison de la ruée des investisseurs vers des placements sûrs en ces périodes de turbulences boursières. Les offres ont atteint 98 milliards de dollars, permettant un financement de cet emprunt à un coût minime (0,304%).
Depuis le début de la crise financière, déclenchée à l'été 2007 par l'effondrement du marché des crédits immobiliers à risques, la Réserve fédérale a joué un rôle majeur pour aider l'économie américaine à passer la tempête.
A côté de mesures de politique monétaire classiques (elle a abaissé son taux directeur à sept reprises depuis septembre 2007), la Fed a été amenée à des pratiques moins orthodoxes. En mars, elle a ainsi financé le sauvetage de la banque Bear Stearns à hauteur de 30 milliards de dollars.
Son aide de 85 milliards à l'assureur AIG, à qui elle évite le dépôt de bilan en contrepartie d'une quasi-nationalisation, est aussi inédite dans la mesure où la Fed n'a pas mission de fournir des liquidités aux assureurs.
De surcroît, la banque centrale a autorisé les banques d'affaires, puis les organisme de refinancement hypothécaire, à venir s'approvisionner en liquidités à son guichet comme le font depuis longtemps les banques de dépôt.
Depuis dimanche, elle se montre aussi moins regardante sur la solidité des contreparties apportées par ces établissements lors de ces opérations, dont elle a aussi augmenté la fréquence. En deux jours (lundi et mardi), la Fed a ainsi fourni au marché bancaire 100 milliards de plus que prévu.
Mercredi matin, elle jugeait la liquidité du marché interbancaire suffisante, mais se disait "prête (à agir) dans la journée si besoin".
Le Trésor note que toutes ces mesures ont affaibli le bilan de la banque centrale. Le produit de la nouvelle émission permettra de "compenser l'effet de (ses) initiatives récentes en matière de prêts et de liquidités sur ses propres réserves".
Elsa Dargent, économiste de Natixis, relève en effet que le portefeuille de titres (essentiellement des obligations du Trésor) détenus en propre par la Fed a fondu de près de 300 milliards par rapport à décembre 2007 pour descendre à 479,7 milliards.
Le gouvernement américain a recouru à la dette après avoir répété plusieurs fois ces jours-ci qu'il veillerait à protéger au mieux les intérêts de contribuables. La Maison Blanche avait déjà revu à la hausse en juillet sa prévision de déficit budgétaire pour l'exercice fiscal devant commencer en octobre, tablant désormais sur un déficit record de 482 milliards de dollars.