Total et Leclerc, deux des principaux distributeurs de carburants en France, ont assuré vendredi qu'ils répercuteraient à la pompe --si elle se maintenait-- la baisse des prix du pétrole qu'a engendrée la décision de l'AIE de puiser dans ses stocks.
Jeudi soir, après la décision des 28 pays membres de l'Agence internationale de l'énergie, le ministre de l'Energie Eric Besson avait instamment demandé à Total --cité nommément-- et aux autres distributeurs de répercuter à la pompe une éventuelle baisse des cours.
"Nous pensons, nous espérons que cette mesure (de l'AIE, ndlr) aura un impact positif sur les prix, et nous ne manquerons pas de la répercuter sur le prix à la pompe, bien sûr", lui a répondu vendredi une porte-parole de Total.
Michel-Edouard Leclerc, patron des centres du même nom qui assure distribuer notamment 12% du gazole en France, s'est fait de son côté plus affirmatif encore: "On va rendre la baisse immédiatement applicable dès lundi" avec une réduction "de 1 à 3 centimes (par litre, ndlr) selon la rotation des stocks", a-t-il promis.
M. Besson s'est félicité vendredi soir que sa demande ait été suivie d'effet. "D'ores et déjà, les groupes Total, Esso, Shell, ENI, Auchan, Leclerc et Les Mousquetaires se sont engagés en ce sens", a-t-il indiqué.
Lors de la semaine achevée le 17 juin, le litre de gazole --le carburant de loin le plus consommé en France-- s'échangeait en moyenne à 1,3335 euro (1,5030 euro par litre pour le sans plomb 95, 1,5435 euro pour le 98).
Aux yeux de Jean-Louis Schilansky, président de l'Union française des industries pétrolières (Ufip, patronat), cette baisse des prix à la pompe sera de toute façon "mécanique", et devrait se ressentir dans le courant de la semaine prochaine.
Immédiatement après l'annonce de l'AIE, les cours du brut ont perdu 7 à 8 dollars par baril et étaient vendredi environ 5 à 6 dollars en-dessous de leurs niveaux de mercredi. Ce qui correspond à une baisse de 2 à 3 centimes d'euro par litre "si les prix du brut se maintiennent à ce niveau", a-t-il chiffré.
"L'ensemble du marché va répercuter cette baisse de prix si elle se maintient", a assuré M. Schilansky. "Que le ministre insiste, soit, mais c'est le mécanisme de fonctionnement du marché qui veut cela".
En revanche, la décision de l'AIE, qui vise à éviter une pénurie à l'approche des migrations estivales alors que l'approvisionnement en pétrole est perturbé par le conflit en Libye, "ne change pas fondamentalement l'équilibre entre l'offre et la demande" sur le marché. "Si la Chine continue à consommer comme elle le fait, les prix du brut repartiront à la hausse, ou au moins se stabiliseront", a-t-il jugé.
De la même manière, "à un moment donné, (les pays membres de l'AIE) devront restocker et racheter les 60 millions de barils" qu'ils vont introduire sur le marché, a rappelé M. Schilansky, prévenant que cela risquait de créer "une nouvelle tension sur le marché".
Une précédente baisse des cours du pétrole brut entre le 2 et le 15 mai avait entraîné une passe d'armes entre compagnies pétrolières et gouvernement.
Un rapport de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) avait en effet souligné que la baisse des cours du pétrole brut n'avait été répercutée sur les prix à la pompe que dans une "proportion de 50% à 70% suivant les réseaux" pour le gazole et "pas ou peu pour le super 95".
La ministre de l'Economie Christine Lagarde avait invoqué ce rapport à l'appui d'une menace d'imposer aux pétroliers de réduire le prix des carburants à la pompe.