Six grands Etats pêcheurs de l'Union européenne, dont les numéros un et deux du secteur, l'Espagne et la France, refusent la suppression programmée des primes à la casse de navires, pourtant jugées inefficaces par Bruxelles et les défenseurs de l'environnement.
Dans une lettre conjointe obtenue vendredi par l'AFP, la Belgique, l'Espagne, la France, l'Irlande, l'Italie, et le Portugal s'opposent aussi à une réduction des subventions au secteur, à la faveur de la révision du budget pluriannuel de l'UE (2014-2020) que Bruxelles entend proposer fin juin.
L'enveloppe financière de la future politique européenne de la pêche, dont la commissaire européenne à la Pêche Maria Damanaki doit présenter début juillet les grandes lignes, doit être "au moins maintenue au niveau de la période 2007-2013", soit autour de 4,3 milliards d'euros, souligne cette lettre.
Les six pays demandent aussi que ces subventions servent, de façon au moins transitoire, à financer la "réduction de la capacité de la flotte", et se disent attachés au "maintien d'un financement européen en faveur de la modernisation des navires".
Ces dernières semaines, Maria Damanaki n'a pas caché son intention de supprimer les "primes à la casse" --ces subventions destinées à encouragr la réduction de la flotte européenne de pêche-- pour les remplacer par un marché de quotas de capture individuels, échangeables entre pêcheurs d'un même Etat.
L'expérience a montré que de tels marchés avaient contribué à d'importantes réductions des flottes de pêche là où ils ont été introduits, comme au Danemark.
Et le système actuellement en place des primes à la casse n'a pas empêché la flotte européenne d'être largement surdimensionnée par rapport aux ressources halieutiques surexploitées, fait valoir la commissaire Damanaki.
"Il faut arrêter de gâcher en vain l'argent du contribuable", alors que les efforts pour réduire la flotte européenne à ce jour "n'ont pas donné de résultats", a-t-elle récemment déclaré lors d'un discours à Londres.
Supprimées depuis 2002 car accusées d'avoir favorisé la surpêche, les primes à la modernisation des navires pourraient devenir un autre point de friction entre les Etats signataires de la lettre et la Commission.
Les six Etats voudraient les réintroduire afin, selon eux, de "réduire la consommation d'énergie, promouvoir des méthodes de pêche plus sélectives et améliorer la sécurité" à bord des navires.
Financer la construction de nouveaux navires plus sûrs et plus performants, risque cependant d'accroître les capacités de pêche au lieu de les réduire, fait valoir la Commission.
Un rapport publié l'an dernier par l'ONG Pew Environnement avait notamment établi un lien clair entre les subventions à la pêche, en particulier les primes à la modernisation, et la surexploitation des stocks.
A l'heure actuelle, selon Bruxelles, plus de 60% des stocks d'Atlantique et de mer du Nord sont considérés comme surexploités,une proportion qui est même de plus 80% en Méditerranée.