(AOF / Funds) - "Lorsque, durant l'hiver 2008/2009, la situation paraissait inextricable, la mise en place de stratégies coordonnées avait permis le retour de la croissance. Les gouvernements et banques centrales des pays industrialisés et émergents s'étaient mobilisés conjointement et avec succès. La réussite de la réunion du G20 à Londres, en avril 2009, traduisait la volonté de tous les membres de travailler côte à côte", note Philippe Waechter, directeur de la recherche économique de Natixis Asset Management.
"A partir du printemps 2010, cette dynamique collective s'est progressivement épuisée, laissant à chacun l'obligation de rechercher les ressorts nécessaires pour faciliter le retour de la croissance et de l'équilibre sur le marché du travail. L'échec du G20 de Séoul en novembre 2010 reflète bien ce contexte particulier."
"Chacun espérait pouvoir bénéficier d'un ENVIRONNEMENT porteur pour trouver des solutions à ses propres déséquilibres. Ce ne fut pas le cas. Les pays émergents ont gagné en autonomie durant toute cette période, alors que pour les pays industrialisés la situation est plus complexe. Si la reprise constatée en 2009 a permis une amélioration conjoncturelle significative, elle n'a toutefois pas atténué les déséquilibres nés de la récession et de la crise bancaire et financière."
"En cette fin d'année 2010, les pays émergents cherchent pour la plupart à gérer leur cycle économique et à converger vers un taux de croissance soutenable à moyen terme. Pour les pays industrialisés, à l'exception de l'Allemagne, le cycle de reprise suit un rythme insuffisant, incapable de réduire rapidement les déséquilibres nés de la crise. Dès lors, le changement de rapport de force entre pays industrialisés et pays émergents se reflète dans l'incapacité des leaders mondiaux à partager des orientations communes."
"L'économie en 2010 est marquée par une très grande hétérogénéité. Contrairement à ce qui était observé avant la crise, elle ne porte plus uniquement sur les modes de croissance, même si la distinction sur les ressorts de la croissance entre pays industrialisés et émergents est toujours pertinente. Il faut en effet ajouter à cela davantage d'incertitude sur le modèle qui est à l'oeuvre au sein des pays industrialisés. Le choc subi lors de la crise bancaire et financière persiste et engendre des dynamiques différentes de celles d'avant-crise. Les comportements des acteurs économiques ont été affectés car les contraintes subies ne sont plus les mêmes."
"La trajectoire de l'économie est désormais sous le sceau d'une incertitude nouvelle et l'HORIZON économique quelque peu incertain limite les prises de risques. Sur ce plan, la distinction est nette entre pays développés et émergents, la trajectoire de ces derniers étant perçue comme plus déterministe que celle des pays industrialisés. Cela peut devenir une source d'arbitrage en leur faveur sur les marchés financiers."
"L'horizon économique incertain se traduira par une croissance encore modérée dans les pays industrialisés pour l'année qui s'ouvre. Un taux de croissance positif y est attendu, mais un peu au-dessous de celui observé avant la crise. La probabilité d'une rechute en récession paraît cependant très limitée, tant aux tats-Unis qu'en Europe. La problématique de ce scénario réside dans le fait qu'il ne permet pas la mise en place d'une dynamique habituelle de sortie de crise, qui calerait rapidement l'activité sur un sentier de croissance robuste."
"En sortie de récession (en l'absence de crise financière), un fort rebond de la croissance est généralement constaté, à l'image de ce qui a été observé dans les pays émergents. Le choc négatif est alors rapidement effacé et l'économie peut repartir de l'avant. Mais dans le cas d'une crise financière et bancaire, un tel rebond est moins évident puisqu'il faut au préalable corriger les excès financiers qui ont mené à la crise. Ce processus prend du temps. La résorption des excès passe souvent par une première période de dégradation des indicateurs budgétaires, marqués par une hausse de la dette publique."
"La correction budgétaire qui s'ensuit limite le rebond de l'activité et nécessite, pour être efficace, le maintien d'une politique monétaire très accommodante. C'est le schéma dans lequel devraient s'inscrire les économies américaine et européenne. Deux remarques à ce stade : l'adoption par la Fed d'une politique monétaire encore plus accommodante avec le quantitative easing suggère la nécessité d'une stratégie plus accommodante du côté des pays européens afin d'être en phase au sein des pays industrialisés ; une stratégie monétaire plus accommodante en Europe peut, quant à elle, permettre de compenser les effets très restrictifs des politiques budgétaires mises en oeuvre dans les différents pays européens. Elle nécessite néanmoins un arbitrage qui, à court terme, ne doit pas se faire au détriment de l'activité et de l'emploi."
"Aux tats-Unis, la dynamique du marché du travail va rester fragile.