Jouets, produits alimentaires, vêtements. Le discrédit touche aujourd’hui l’ensemble du "Made in China". Mais c’est le scandale du lait contaminé à la mélamine qui a conduit le gouvernement chinois à renforcer les contrôles. L’affaire a fait grand bruit, conduisant récemment la Chine à lancer une opération séduction via une campagne de publicité que l’on a pu voir notamment sur CNN, et dans laquelle on vante la qualité des produits chinois.
Mais la bataille ne se joue pas uniquement sur le terrain médiatique. Dans les usines également, ces scandales à répétition ont incité les autorités chinoises à multiplier les contrôles : "Il y a une augmentation des audits d’usine de +66% par rapport au troisième trimestre 2008. Cela indique que les consommateurs continuent de réclamer des produits de qualité. Les entreprises important d’Asie font de la qualité une priorité pour protéger leur marque. Cette attitude a permis un quatrième trimestre quasiment exempt de scandales "Made in China"", relèvent les auteurs d’une étude menée par Asia Inspection, une entreprise indépendante chargée du contrôle qualité par de nombreux importateurs de produits Chinois.
"Les fêtes de fin d’année ont donné lieu à une forte augmentation du nombre d’inspections pour une majorité de produits. Les inspections pour les jouets et l’électronique ont augmenté respectivement de +56 % et +42%. Les inspections de textile sont aussi en hausse de 67%, indiquant que les mesures chinoises se sont avérées efficaces", précise cette étude.
Et de fait si les inspections et les contrôles se sont multipliés, jamais la Chine n’aura autant produit et exporté jusqu’à dépasser l’Allemagne pour devenir le premier exportateur au monde en 2009. Et ce n’est pas terminé, puisque les statistiques officielles prévoient une nouvelle hausse de 8% des exportations en 2010. Le "Made in China" n’est pas mort.
"Après le scandale des jouets Mattel, des usines ont fermé. Le gouvernement a pris des mesures exemplaires et restrictives. Les contrôles gouvernementaux sont plus nombreux. Cela n’a pas empêché une résurgence du problème du lait à la mélanine en février dernier. Néanmoins, cette micro-crise a permis au gouvernement chinois de tester son système d’alerte et de gestion de crise", précise Maximilien Triquigneaux, responsable marketing d’Asia Inspection.
Usines fermées
Des contrôles plus nombreux, certes, mais qui restent insuffisants. Ainsi beaucoup de produits sont bloqués dans les ports d’importation en Europe et aux Etats-Unis pour défaut de qualité. Les contrôles sur les chaînes de production restent insuffisants. "Les normes à respecter dépendent du pays importateur, souligne Maximilien Triquigneaux. Pour les normes en vigueur, nos laboratoires les connaissent et sont à jour sur les constantes évolutions que subit cette industrie. Nous avons des experts par catégorie de produit (expert textile, expert jouet, expert électronique) pour suivre les différentes réglementations selon les pays d’importation. À la demande du client, nous pouvons aussi mesurer l’impact environnemental de l’usine et l’auditer sur le recyclage du papier, le retraitement des déchets, la certification Iso 14000 ou non..."
En matière environnementale, les normes là aussi dépendent principalement des pays d’importation. Actuellement, les plus connues sont RoHS (restriction de certaines substances dangereuses dans les équipements électriques et électroniques), REACH (substances chimiques) ou encore Energy Related Products (EuP) pour l’éco-conception des produits. Des normes qui se multiplient et un gouvernement central plus soucieux de son image. Résultat, des centaines d’usines sont fermées chaque année pour non-respect des normes chinoises. Depuis l’année dernière, la Chine investit dans des organes de surveillance et de contrôle et tient une liste noire des entreprises ne respectant pas les normes qualité.
Situation disparate
"Il est vrai que les chinois ont de plus en plus conscience de leur environnement et prennent des mesures au niveau gouvernemental, observe Maximilien Triquigneaux. Ce sont des mesures qui se traduisent par des coûts plus élevés pour les usines. Délocaliser au Vietnam ou aux Philippines permettrait certes une même qualité et un coût moindre, mais nous n’avons pas constaté pour autant une tendance à la délocalisation. Par ailleurs, pour ce qui est du Bangladesh par exemple, les infrastructures chinoises sont bien meilleures, donc il n’y a pas de risque".
Reste que la situation est encore très disparate. Certaines usines chinoises produisant par exemple des micro-ondes comme Galanz, écrivent désormais les standards internationaux. Tandis que d’autres continuent de tourner sans être aux normes. "Récemment nous avons eu des ampoules à LED sans isolation électrique, se rappelle Maximilien Triquigneaux. Et, souvent, les jouets présentent des risques d’étouffement. C’est aux importateurs de communiquer clairement leurs spécifications et un cahier des charges précis. On ne peut pas reprocher à une usine chinoise de ne pas connaître tous les standards et normes internationales en vigueur".
Stéphane Pambrun à Pékin (Chine)