Les gérants français qui proposent des fonds ISR à leurs clients ont désormais à leur disposition un code de transparence remanié dont l’usage est obligatoire. Il s’agit de pouvoir expliquer, le plus clairement possible, les grandes lignes de leur politique d’intégration des critères Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG) à la gestion. Données générales, critères d’investissement ESG, processus d’analyse ESG, Evaluation, sélection et politique d’investissement, Politique d’engagement et politique de vote, sont les 6 rubriques que les gérants vont devoir décliner en répondant à une trentaine de questions plus précises.
Ce code de transparence est une initiative européenne visant à créer un cadre commun et partagé par tous les promoteurs de fonds ISR. Lancé en 2004, il a été retravaillé, à l’initiative de la France, pour optimiser son utilisation et simplifier son usage pour les offreurs de fonds mais aussi pour leurs clients potentiels. La particularité française de ce code est qu’il est porté à la fois par l’Association Française de la Gestion d’actifs (AFG) qui représente les professionnels de la gestion pour compte de tiers (gérant ensemble 2500 milliards d’euros d’actifs), et par le Forum pour l’Investissement Responsable, association française de promotion de l’ISR. « C’est un outil pour mieux toucher le secteur des particuliers » a expliqué son président, Robin Edme, lors de la conférence de presse de lancement, le 12 janvier 2010. Les promoteurs du code savent que pour cela, il est indispensable de simplifier quelque chose de complexe par nature, la diversité des sigles utilisés, la terminologie mais aussi les méthodologies restent diverses et variées.
Encadrer les pratiques
« L’ISR est un domaine dans lequel l’innovation et la créativité sont importantes et nous devons contribuer à ne pas les brider » a précisé Paul de Marcellus, président du groupe de travail Code de transparence de la Commission ISR de l’AFG.
Les principales innovations de la nouvelle version portent sur la définition que la profession donne à l’ISR. Elle acte la nécessité de prendre «systématiquement en compte les trois dimensions du développement durable que sont l’environnement, le social/sociétal et la gouvernance en sus des critères financiers usuels». Le code est dorénavant assorti d’un manuel d’utilisation destiné à encadrer les réponses fournies par les gérants. Ils avaient des interprétations très différentes de la précédente version et ne se prêtaient pas forcément à l’exercice. Ils n’ont dorénavant plus le choix et ont jusqu’à juillet 2010 pour se mettre en conformité. Pour s’assurer que ses membres ont bien respecté cette nouvelle obligation, l’AFG va répertorier les fonds ISR et leur réponse au code de transparence sur son site Internet.
Débats législatifs animés
Les fonds ISR sont la partie la plus visible d’un mouvement plus large d’intégration par le secteur financier des trois dimensions du développement durable, (Environnementale, Sociale et de Gouvernance). De façon plus générale, les pratiques qui se développent consistent non seulement à analyser les entreprises sur ce type de critères et donc à attendre d’elles un reporting adapté mais aussi, au-delà des fonds dédiés, à intégrer ces critères dans la gestion d’actifs de toute nature, actions et obligations d’entreprises mais aussi obligations d’états, actifs immobiliers, entreprises non cotées… Pour cette raison, le projet de loi Grenelle 2 s’intéresse à ces divers aspects, dans ses articles 82 et 83. Le premier concerne les sociétés de gestion et prévoit une modification du code monétaire et financier qui leur demanderait d’indiquer dans leurs rapports annuels les modalités de prises en compte des critères ESG dans leur politique d’investissement. En l’état, les sociétés de gestion peuvent se contenter de préciser qu’elles ne le font pas puisqu’il ne s’agit en aucun cas d’une obligation d’associer l’analyse financière et extra-financière. L’article 83 concerne les entreprises. Il prévoit une obligation d’information « sur la manière dont la société prend en compte les conséquences sociales et environnementales de son activité ».
Un décret, publié ultérieurement, précisera la nature des informations à fournir. La loi prévoit aussi d’étendre cette obligation qui concerne, depuis 2002, les entreprises cotées à toutes les entreprises qui emploient plus de 500 salariés et réalisent un chiffre d’affaires minimum dont le montant fait encore l’objet d’un débat animé.
Avant leur adoption, ces deux articles de la loi Grenelle 2 font l’objet d’un lobbying intense de tous ceux qui sont concernés : les professionnels de la gestion d’actifs mais aussi des associations comme le Forum pour l’Investissement responsable ou des ONG comme Sherpa qui milite pour renforcer le cadre juridique appliqué à la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE). (Voir interview liée). Le projet de loi est toujours en cours de discussion devant l’Assemblée nationale et des centaines d’amendements ont été déposés. Il est encore trop tôt pour savoir si sa version finale encouragera ou non une version français de l’ISR pour la gestion d’actifs et de la RSE pour les entreprises.