Le déficit commercial de la France s'est un peu réduit en juin, mais s'est nettement creusé au premier semestre, pâtissant à la fois de l'alourdissement de la facture énergétique et de la détérioration du déficit industriel, ce qui va nécessairement peser sur la croissance.
Après les records mensuels d'avril et mai à 6,8 et 6,4 milliards d'euros, le déficit commercial français s'est un peu amélioré à 5,6 milliards en mai, selon les chiffres publiés vendredi par les Douanes.
Un repli "ponctuel", selon plusieurs analystes, qui s'explique par un "important recul des importations", notamment de produits énergétiques, alors que, dans le même temps, les exportations sont demeurées globalement stables.
"Ce repli est saisonnier, il y a toujours une amélioration à cette période de l'année parce qu'on importe moins de produits pétroliers", a souligné Juliette Hubert, économiste au cabinet Asterès. "C'est en outre le pire mois de juin jamais enregistré", a-t-elle ajouté.
Sur le semestre, le tableau est encore moins rose. Le déficit commercial s'est établi à 37,5 milliards d'euros, un record semestriel, après "seulement" 27,6 milliards au deuxième semestre 2010.
Il file désormais "tout droit vers un nouveau record annuel, autour des 70 milliards d?euros", a commenté Alberto Balboni, économiste chez Xerfi.
Au premier semestre, le commerce extérieur de la France a pâti à la fois de l'alourdissement de la facture énergétique et de la détérioration du déficit industriel.
La progression des importations a été plus soutenue, en raison du surcoût des achats énergétiques lié aux tensions sur les prix du pétrole et du gaz.
Surtout, la croissance des exportations, engagée depuis fin 2009, a marqué le pas par rapport au semestre précédent, a souligné le ministère des Finances.
Et le niveau des ventes reste aujourd'hui inférieur à celui d'avant la crise. "La crise a été une parenthèse", a indiqué Juliette Hubert. "Les échanges se contractant, le déficit s'était un peu réduit, ce n'est plus le cas", a-t-elle relevé.
Dans le détail, au premier semestre, "le ralentissement s'explique surtout par le recul de l'aéronautique, après les niveaux exceptionnellement élevés atteints l'année passée", selon Bercy. Mais il tient aussi au repli des exportations d'équipements informatiques et électroniques.
"Unique exception à ce mouvement, le secteur agro-alimentaire a vu son excédent s?améliorer de 520 millions d?euros", a souligné Antonio Balboni. "Trop peu pour compenser la débâcle généralisée de l?industrie", selon l'analyste.
"Force est de constater que la machine à exporter française est en panne depuis la fin de 2010", a ajouté l'économiste.
Après le recul de la consommation enregistré d'avril à juin, cette contre-performance est une mauvaise nouvelle de plus pour la croissance française, dont les chiffres du deuxième trimestre seront publiés vendredi prochain par l'Insee.
Selon l'Institut national de la statistique, la contribution du commerce extérieur sur la croissance du produit intérieur brut devrait être nulle au deuxième trimestre.
Sur l'ensemble de l'année, elle serait négative (à hauteur de -0,6 point), selon l'Insee.
"Ce qui se passe est très grave", reconnaissait récemment le secrétaire d'Etat au Commerce extérieur Pierre Lellouche, insistant sur le "problème de compétitivité" de l'économie française.