La consommation des ménages, unique soutien jusqu'ici de l'activité, a reculé en février pour le deuxième mois d'affilé, minée par la diminution de la prime à la casse et des mesures de relance, ce qui fait peser une lourde menace sur la croissance française cette année.
Les dépenses de consommation des ménages en produits manufacturés se sont repliées de 1,2% par rapport au mois précédent, a annoncé jeudi l'Insee. En janvier, elles avaient déjà baissé de 2,5%, plombées par le recul des achats automobiles avec la diminution du montant de la prime à la casse.
En février, l'effet est beaucoup moins net mais pèse toujours sur les dépenses en biens durables (-0,8%, après -7,7% en janvier), avec une baisse de 1,5% des achats d?automobiles (après -16,7% en janvier).
"Après avoir fait les beaux jours de la consommation en 2009, l?automobile devrait la tirer vers le bas en 2010", prévient Marc Touati, économiste chez Global Equities.
Alexander Law, économiste au cabinet Xerfi, s'attend de son côté à "une baisse totale des immatriculations de 10% cette année".
Le mois dernier, les ménages ont surtout moins dépensé en achats de textile-cuir, en recul de 5,4% après deux mois de croissance. Un phénomène qui s'explique par le calendrier des soldes, plus courts cette année, selon l'Insee.
"Devant l'incertitude conjoncturelle et face à un marché du travail qui continue de se dégrader, les Français renoncent aux dépenses superflues", analyse pour sa part Alexander Law.
Les dépenses en équipement du logement ont également diminué (-0,4%), après un mois de janvier dynamique (+1,2%).
"Corrigée des facteurs exceptionnels et non récurrents des deux derniers mois, la consommation française continue de résister", fait-on valoir dans l'entourage de la ministre de l'Economie, Christine Lagarde.
Mais pour les économistes, l'alerte est sérieuse. "Tous les déterminants de la consommation sont mal orientés", estime Jean-Christophe Caffet, chez Natixis: "l'inflation repart à la hausse, l'emploi est déprimé, les salaires s'ajustent par le bas et les mesures prises en 2009 comme la prime à la casse ou les baisses d'impôts ne seront pas reconduites en 2010".
Jusqu'ici la consommation, traditionnel moteur de la croissance française, résistait "grâce à la désinflation et à des mesures d'aides transitoires mais ces deux facteurs ont disparu", ajoute-t-il.
"Après avoir été masquée en 2009 par divers artifices et soutiens publics, la réalité de l?économie française va vraiment se faire jour en 2010", pense aussi Marc Touati.
Alors que l'investissement des entreprises demeure atone et que le commerce mondial ne redémarre que faiblement, la croissance française risque en effet de manquer de facteurs de soutien. "La reprise va rester fragile", selon Jean-Christophe Caffet.
La consommation est désormais un moteur qui fonctionne au ralenti, soulignait déjà en décembre l'Insee, dont la nouvelle note de conjoncture devait être rendue publique jeudi soir.
La remontée de l'inflation et la persistance d'un marché de l'emploi déprimé devraient continuer de peser sur les revenus des ménages et la consommation, estime Mathilde Lemoine, économiste chez HSBC.
En février, le nombre de personnes inscrites au chômage a continué à augmenter légèrement. Selon Pôle emploi et l'OCDE, la baisse du chômage se fera attendre jusqu'en 2011 et sera faible.