Vous avez présenté jeudi dernier vos résultats semestriels. Quels enseignements en tirez-vous ?
Pour le premier semestre, notre performance est solide et saine, en ligne avec NOS anticipations. Elle est solide, puisque notre chiffre d'affaires, de 3,79 milliards d'euros, ne recule que de 3 % hors effet de devise et de périmètre, et que notre résultat opérationnel courant est stable à 1,06 milliard d'euros. Notre rentabilité connaît donc une meilleure évolution que notre chiffre d'affaires. Nous avons en outre amélioré la génération de nos cash flows sur cette période. Notre performance est également saine, parce nous l'avons obtenue en défendant nos prix et nos marges et en maintenant un niveau d'investissements publipromotionnels élevé sur nos marques, équivalent à plus de 17 % de notre chiffre d'affaires. Ces éléments nous permettent de confirmer notre objectif annuel d'une croissance interne du résultat opérationnel courant de 1 à 3 %.
L'évolution des changes a eu un impact négatif significatif sur vos comptes ce semestre. A quoi est-il d- ?
Nous avons eu en effet un impact négatif des variations de change, de l'ordre de 100 millions d'euros, sur notre résultat opérationnel courant. Celui-ci s'explique tout d'abord par la forte dévaluation qu'a connue le bolivar vénézuélien. Nous avons également souffert de la baisse de certaines devises, comme le dollar, le rouble, le peso mexicain. Mais, depuis début 2010, le dollar reprend de la vigueur et certaines devises de pays émergents qui s'étaient dévaluées pendant la crise se sont raffermies. Nous pensons que, sur ce sujet, le pire est derrière nous, et nous anticipons sur l'année un impact négatif - sur la base des taux de change actuels - entre 100 et 120 millions d'euros.
Quelles sont vos grandes priorités en matière de gestion de votre endettement ?
Nous avons déjà atteint 80 % de l'objectif de notre plan de cession d'actifs non stratégiques destiné à réduire notre endettement. Nous allons le poursuivre au cours des dix-huit prochains mois, mais sans contraintes de temps excessives. Nous ne procéderons à des cessions que si nous avons la certitude d'en obtenir un bon prix. Nous avons également significativement amélioré nos free cash flows au cours du semestre, en partie grâce à un important programme de cession de créances commerciales, principalement par voie d'affacturage. A fin décembre 2009, nous avons un peu plus de 600 millions d'euros de créances cédés. L'impact favorable de ces cessions de créances sur le cash flow du semestre est d'environ 260 millions d'euros. Nous avons également géré de façon très stricte notre BFR, nos stocks stratégiques et nos investissements industriels. Notre dette est ainsi passée de 10,9 milliards d'euros à 10,3 milliards. Quant à la baisse des frais financiers en tant que telle, deux tiers sont dus à la baisse des taux (y compris des marges bancaires) et un tiers à la réduction de la dette elle-même, grâce aux cessions, aux free cash flows et à l'augmentation de capital que nous avons réalisée l'année dernière. Enfin, nous souhaitons progressivement établir un équilibre de nos financements entre la dette bancaire, qui représente actuellement 75 % de nos financements, et la dette obligataire (25 %), afin d'atteindre une répartition 50/50 en 2013, année d'échéance de notre crédit syndiqué.
Propos recueillis par Guillaume Benoit
AOF - EN SAVOIR PLUS
Attention le groupe clôture ses comptes au 30 juin
Performances et stratégie
Chiffre d'affaires
- Au 30.09.2009 (trimestriels) : 1.646 millions d'euros (- 4% de croissance organique et -6% en données publiées)
- Au 30.06.2009 (annuels) : 7.203 millions d'euros (+9%, croissance interne de -0.4%) (exercice 2008/2009)
Résultats
- Au 30.06.2009 Résultat opérationnel courant : 1.846 millions (+21%, croissance interne +4%) ; Résultat net part du groupe : 945 millions (+13%)
Prévisions
Pour l'exercice 2009-2010, le groupe vise une croissance du résultat opérationnel courant comprise entre 1% et 3 %, à périmètre et à devises comparables et après une relance des dépenses publicitaires. Pour cette année, Pernod Ricard devrait revenir à sa politique habituelle de distribution en numéraire d'environ un tiers de son résultat net courant.
Stratégie
La priorité demeure le désendettement, avec la poursuite du programme de cession d'actifs de 1 milliard d'euros. Le groupe, convaincu de la pertinence de son modèle qui repose sur des marques de luxe, va continuer à augmenter ses prix de façon à suivre au moins l'inflation. Son effort publi-promotionnel va être focalisé sur ses marques clefs. Le groupe a décidé de réinvestir dans ses marques durant son exercice 2009-2010 et de reprendre son offensive publicitaire et commerciale. Pour lui, cette politique représente un axe majeur de son développement car il estime qu'en investissant aujourd'hui sur ses marques il garantit ses profits à venir.
Evènements financiers
Le groupe a décidé d'augmenter le capital de la société (de plus de 8 millions d'euros) par incorporation de réserves et distribution d'actions gratuites à raison d'une action nouvelle pour cinquante actions anciennes.
Il a procédé auparavant à une émission obligataire de 800 millions d'euros auprès d'investisseurs institutionnels pour lui permettre d'allonger la maturité de sa dette. Cette levée de fonds succède à une augmentation de capital de 1 milliard d'euros réussie début mai. Ces opérations visent à renforcer le bilan du groupe.
Forces et faiblesses de la société
Forces
- Pernod Ricard a affiché de très bonnes performances sur l'exercice 2008/2009, supérieures aux attentes des analystes : la très sensible amélioration de la marge opérationnelle (+250 pdb) provient notamment de l'intégration d'Absolut, marque à forte rentabilité ;
- Son activité a bien résisté sur le premier trimestre de son exercice 2009-2010, avec un recul de son chiffre d'affaires limité à 4% en données organiques ;
- Les diverses opérations financières ont permis de renforcer les fonds propres du groupe, tout en lui permettant de réduire son endettement et d'en décaler la maturité. La structure financière est ainsi améliorée ;
- La croissance du groupe est soutenue par sa diversification géographique. L'activité en Asie et dans le reste du monde a progressé de 3% sur le premier trimestre 2009/2010 alors que le chiffre d'affaires a reculé partout ailleurs ;
- Même si le dividende sur le résultat 2008/2009 a été réduit, la rémunération de l'actionnaire est partiellement assurée par la distribution d'actions gratuites ;
- La récente attribution d'actions gratuites est non seulement une bonne nouvelle pour les actionnaires, mais elle souligne également la confiance en l'avenir de l'entreprise ;
- Le groupe dispose encore d'une bonne marge de manoeuvre pour améliorer ses résultats, en poursuivant les synergies liées à l'acquisition de Vin&Sprit (V&S), mais aussi en réduisant ses coûts de structure. La réduction de la dette financière, devrait faire également reculer les frais financiers ;
- Sa stratégie de valeur sur l'ensemble de son portefeuille, avec le développement de ses produits "premium" lui permet de bien résister dans un contexte de crise.
Faiblesses
- Sur le second trimestre de l'exercice (entre octobre et décembre), le groupe pâtit d'une visibilité assez faible ;
- Après l'acquisition de V&S, la dette financière est élevée : sur l'exercice 2008-2009, elle s'est élevée à près de 2 fois les capitaux propres du groupe ;
- Le dividende prélevé sur le résultat 2008/2009 est en recul même si le retour à la politique habituelle de distribution en numéraire d'environ 1/3 du résultat net courant est prévu dès l'exercice 2009/10.
La valeur et son secteur
Principales activités
Vins et spiritueux (Alcools blancs et Rhums, Whiskies, Anisés, Liqueurs, Cognacs & Brandies, Amers)
Le secteur
Si les ventes de spiritueux sur le marché français ont progressé sur les neuf premiers mois de 2009, les exportations ont reculé de 15% en valeur. Le Cognac, premier spiritueux exporté par la France, souffre toujours de la crise avec une baisse de ses exportations de 20% sur les neuf premiers mois de l'année. C'est essentiellement en Russie que les ventes enregistrent leur plus mauvaise performance avec une chute de 44% en valeur et de 8% des volumes.
La valeur dans son secteur
Leader mondial des spiritueux haut de gamme ; numéro deux mondial des vins et spiritueux (derrière Diageo)
Comment suivre la valeur
- Les deux tiers de l'activité et des profits sont réalisés sur le premier semestre (juillet-décembre) le quart de l'activité étant même réalisé en décembre ;
- Vérifier que les synergies se poursuivent dans les prochains mois du fait de l'intégration de V&S ;
- Suivre le processus de cession des activités non stratégiques.
Rémunération des actionnaires
Dividendes versés
0,50 euro par action au titre de l'exercice 2008-09
Taux de distribution des dividendes
12,5% (sur résultat 2008-2009)
Taux de croissance du dividende par action
-62% (sur résultat 2008-2009)
Rendement moyen 2009
1%
Estimations de dividendes par action
1,29 euro en 2010
LE SECTEUR DE LA VALEUR
Agroalimentaire
Les intervenants sont bien conscients qu'ils doivent adapter leur offre à la demande en temps de crise. Si, contrairement à Danone, Nestlé ne veut pas réduire ses prix, il consolide toutefois son positionnement sur des produits accessible à tous. Initialement destinés aux pays émergents, ces articles sont aujourd'hui développés dans les pays matures. Dans le même temps le groupe suisse a renforcé ses investissements publipromotionnels et ses dépenses de recherche et développement, avec l'objectif de proposer des produits à forte valeur ajoutée. Sur le long terme, les géants du secteur considèrent que la santé fait partie de leur axe majeur de développement. En Chine, Danone, qui a perdu son bras de fer contre son partenaire Wahaha, et devra finalement céder ses parts pour cinq fois moins que le montant initialement demandé, va se développer seul. Il se recentre sur les produits à forte valeur ajoutée orientés vers la santé, en lançant un yaourt Bio.