
Les exemples dans la presse se multiplient. Des jeunes d'emprunteurs se retrouvent étranglés par leur prêt immobilier.
Prenons un exemple chiffré.
Quand on emprunte 150 000 euros sur 25 ans avec un taux variable de 3.3 %, l'échéance est de 735 euros hors assurance. 18 mois plus tard, quand le taux variable indexé sur l'euribor atteint les 5 %, l'échéance est de 880 euros. Dans le même temps, les salaires n'ont pas augmenté et de nouvelles charges sont venues grever le budget du ménage (impôts fonciers, travaux d'entretien...). Image Les clients qui ont emprunté sur de longues durées sont ceux qui étaient le plus juste au niveau budget. Pour compenser le doublement des prix de l'immobilier depuis 2001, les banques ont allongé la durée des prêts. Dans le même temps, les taux dégringolaient, les emprunteurs se sont retrouvés avec du pouvoir d'achat supplémentaire.
Des couples s'estimant piègés en appellent à l’association des usagers de la banque. Les journalistes conseillent de faire racheter son prêt à taux variable par une banque concurrente. Je vois pas l’intérêt de se faire racheter aujourd’hui un taux variable par un prêt en taux fixe. Le taux sera le même et le client aura des frais (pénalités de remboursement anticipé dans sa banque, frais de main-levée d’hypothèque et nouveaux frais d’hypothèque).
Bien entendu, le couple accuse sa banque de l’avoir mal conseillé. En 2003, les clients qui avaient emprunté en taux fixe 5 ans auparavant reprochaient à leurs banquiers de ne pas leur avoir proposé du taux variable. Normal, les taux baissaient. C’était le début de la période « je vais à la concurrence me faire racheter mon prêt ». Et depuis que ça monte, ceux qui ont obtenu un taux fixe très bas vont-ils retourner voir leur banque pour renégocier le taux ?
Aujourd’hui, ceux qui ont du variable reprochent à leur banque de ne pas leur avoir fait du fixe.
Je ne doute pas que certains clients se soient faits piégés par les banques et leurs offres alléchantes (3,3% taux fixe pendant 1 an puis taux variable, taux variable mais mensualités fixes donc la durée du prêt peut s’allonger).
Cela étant, concernant le reproche de défaut de conseil. C’est un peu exagéré. Entre les courtiers dont le rôle est de défendre les intérêts de leurs clients emprunteurs, les sites façon meilleurtaux.com, les revues de consommateurs plus la pratique courante du « je fais le tour des banques avant de choisir la meilleure offre », j’estime que la très grande majorité des emprunteurs sont informés avant de signer un prêt. En tous cas, bien plus qu’il y’a 5 ans.
J’ai remarqué que les acheteurs prenaient plus de temps pour choisir leur offre de prêt immobilier que pour choisir leur appartement ou leur maison.
Que va-t-il se passer ?
Les associations de consommateurs, pour justifier leur utilité et la vente de leurs magazines, vont attaquer les banques. Le coup classique. Les banques sont mal, notamment sur les offres en taux variable non capées au niveau du taux et de la durée. Beaucoup de prêts sont faits avec une échéance fixe mais un taux variable qui joue sur la durée du prêt. Je pense que les banques ne vont pas tarder à caper d’office les prêts litigieux. Et les clients prenant peur en lisant la presse vont retourner spontanément voir leur banque pour fixer les taux.
Si l’augmentation de votre échéance de 150 euros vous conduit droit à la commission de surendettement, c’est que votre dossier de prêt était beaucoup trop juste. Comme déjà évoqué, les cas de clients pris à la gorge par leurs échéances de prêt immo se multiplient. Ayant emprunté sur des durées trop longues, avec les prix de l’immobilier qui sont passés du stade de l’atterrissage en douceur à celui de l’écrasement au sol sans train d’atterrissage, la vente du logement ne permettra pas de solder la créance. Ils se retrouveront donc locataires, avec un morceau de prêt immobilier transformé en prêt consommation pour pouvoir rembourser la banque.
A mon avis, la responsabilité des banques est d’avoir fait du crédit immobilier sans trop regarder la qualité des dossiers à des taux trop bas (inférieurs à leur coût de refinancement), histoire de conquérir de nouveaux clients. Moi, j’appelle ça acheter des clients avec du quasi gratuit.
Conséquence, les prix de l’immobilier ont doublé en dix ans. Ce n’est pas le pouvoir d’achat qui a doublé, mais la capacité d’emprunt. Au début, on baisse les taux et quand ça ne suffit plus on allonge la durée des prêts. Ce qui donne une superbe hausse des prix. Très malsaine car ne reposant pas sur la valeur intrinsèque des biens.
Qui va mourir ?
Il va y avoir des victimes. C’est sûr. Comme la justice sociale n’existe pas, ce sont les plus modestes qui ont rêvé de devenir propriétaires qui vont trinquer. Dans le meilleur des cas, après 30 ans de remboursement et de privations, ils auront la joie de transmettre un F3 de 80m2 à leurs enfants (qui n’auront pas fait d’études faute de moyens des parents). Dans le pire des cas, ils revendront leur logement, encaisseront une petite moins-value, se retrouveront locataires avec des dettes.
Qui a gagné de l’argent ?
Les banques ? Je crois pas, quand on prête avec une marge négative et en prenant des risques sur de nombreux mauvais dossiers, ça fait mal au compte de résultat. Il suffit de regarder les cours des actions des banques françaises… Les marchés financiers ne se sont pas trompés.
Grands gagnants : les courtiers qui ont encaissé des commissions rapidement sans trop travailler et sans prendre de risques, les agents immobiliers et ceux qui se sont débarrassés de leurs nanars à prix d’or, les artisans qui ont retapé un paquet de maisons, les promoteurs immobiliers qui ont margé à 50% sur les programmes neufs, les defiscalisators qui ont vendu du vent et les vendeurs de poêles au bois.
Le malheur des uns permettant aux autres de s'enrichir et la morale n'étant qu'un concept, les plus malins rachèteront les maisons des moins chanceux.
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