Les Bourses mondiales ont de nouveau chuté la semaine dernière, affolées par la dégradation de la conjoncture économique et la multiplication des avertissements des sociétés. Dans le sillage du Dow Jones, qui affichait vendredi à mi-séance une perte de près de 5,5% sur la semaine, le CAC 40 a lâché 4,09% pour revenir à 3194 points, son plus bas niveau depuis le 16 octobre.
Tiraillés entre la menace de récession mondiale et les rachats à bon compte, les marchés ont joué aux montagnes russes jusqu'au plongeon de vendredi. La Bourse de Tokyo, principale place financière d'Asie a clôturé ce vendredi noir sur un repli de 9,6%. A Paris, le CAC 40 a perdu jusqu'à plus de 10% en séance et enfoncé la barre des 3000 points, du jamais vu depuis la mi-2003. A Wall Street, les contrats sur indices ont même tellement baissé qu'ils ont d- être gelés à plusieurs reprises.
Les derniers indicateurs d'activité publiés des deux côtés de l'Atlantique ont confirmé le ralentissement plus marqué de l'économie. En Europe, le Royaume-Uni a été le premier pays a annoncé une contraction de son produit intérieur brut (PIB) sur le trimestre allant de juillet à septembre, mais d'autres sur le continent européen devraient lui emboîter le pas. Selon les derniers indices PMI flash, l'activité économique du secteur privé de la zone euro a connu son pire accès de faiblesse en octobre depuis la création de l'Union Monétaire. « C'est fait, il est clair que nous entrons dans une récession », a commenté Gilles Moêc, économiste chez Bank of America.
Les craintes des opérateurs se sont renforcées avec les signaux négatifs envoyés par les multinationales. Au Japon, Sony a sévèrement revu à la baisse ses objectifs annuels. Aux Etats-Unis, des groupes aux activités aussi diverses qu'Amazon, Texas Instrument ou UPS ont fait de même, signe que la crise se ressent maintenant sur les performances des sociétés.
L'angoisse d'une récession économique mondiale s'est diffusée au marché pétrolier. Le cours du baril WTI a enfoncé le seuil des 64 dollars malgré la décision de l'Opep de réduire sa production. Depuis son record absolu de plus de 147 dollars, les cours du brut ont perdu près de 57% de leur valeur.
Le dollar a profité de cette flambée de l'aversion au risque. Le billet vert a gagné près de 6% pour toucher un plus haut de près de deux ans à 1,2498 dollar pour un euro.
A la Bourse de Paris, les valeurs cycliques, notamment celles liées aux matières premières, ont été particulièrement attaquées. En revanche, quelques valeurs défensives comme Carrefour ou Air Liquide ont évité le naufrage tandis qu'EADS a profité de l'envolée du dollar.
Les valeurs liées aux matières premières ont mené la baisse. Le géant minier anglo-australien BHP Billiton et le premier sidérurgiste mondial ArcelorMittal ont renforcé les inquiétudes sur la demande globale. Le premier a indiqué que « l'incertitude » persistera en Chine à mesure que l'économie ralentira ; le second a annoncé qu'il était en train de réexaminer son plan de développement en raison de la crise économique. Dans ce contexte, ArcelorMittal a cédé 23% et Vallourec 20%.
Le secteur des biens d'équipements industriels a souffert. Les mauvais résultats du suisse ABB ont rejailli sur le cours d'Altsom : la valeur s'est repliée de plus de 20% malgré la signature d'un contrat cadre de 140 millions d'euros avec EDF. Depuis le début de l'année, la capitalisation boursière du groupe de Patrick Kron a fondu de près de 55%.
L'automobile :un secteur sinistré. Les craintes de récession se sont retrouvées dans les avertissements de Renault et PSA Peugeot Citroên sur leurs résultats. « La crise est là », a reconnu Patrick Pélata, le directeur général de Renault. Si le constructeur n'a pas donné de détails sur ses perspectives 2009, il reconnaît qu'il n'atteindra pas 4,5% de marge en 2008. De son côté, PSA a fortement réduit son objectif de marge 2008 et annoncé plusieurs mesures drastiques pour se préparer à une année 2009 difficile, avec notamment une réduction massive de 30% de sa production sur le sol européen par rapport à son objectif initial. L'action Peugeot a chuté de près de 11% en une semaine, Renault de 22%.
Le secteur aérien pénètre lui aussi dans une zone de fortes turbulences. Air France-KLM a prévenu qu'il lui serait très difficile d'atteindre son objectif de résultat d'exploitation pour l'exercice en cours en raison de la dégradation de la situation économique. La compagnie franco-néerlandaise a par ailleurs décidé de mettre en oeuvre un plan d'économies supplémentaires et de réduire son plan d'investissement. Secoué par cette annonce, le titre affiche une chute de 20% sur la semaine.
Veolia Environnement a perdu la confiance du marché. L'annonce d'une réduction de sa prévision de capacité d'autofinancement en 2008 a fait plonger le titre de 21% lundi. Pour CM-CIC, le groupe présente « deux problèmes », avec d'une part un doute sur « la fiabilité de la remontée d'information des branches vers le management », et d'autre part « un retard considérable sur la restitution de cette information du management vers les marchés ». Au final, le titre accuse une perte de 25% sur la semaine.
(P-J.L)