(AOF / Funds) - "Si l'on considère le volet budgétaire, les solutions les plus radicales pour mettre un terme à la crise sont la mutualisation des dettes souveraines ou la monétisation de ces dettes. Mais plusieurs pays de la zone euro ne veulent pas entendre parler d'Eurobonds, et la BCE n'est pas disposée à monétiser la dette des pays en difficulté, plus exactement, elle ne veut pas aller au-delà de ce que le SMP lui permet de faire (elle a acheté la semaine dernière 3,95 milliards d'euros, bien moins que la semaine précédente)", note René Defossez de Natixis.
"Il y a mille façons d'illustrer la crise budgétaire au sein de la zone euro, la plus habituelle passant par les spreads entre le rendement des obligations des pays périphériques et celui du Bund : ainsi, depuis trois jours, le spread PGB-Bund 10 ans dépasse 1000pb. On peut aussi observer le comportement des CDS sur la dette allemande."
"Sur le cash, les papiers allemands profitent de leur statut de valeur refuge et affichent des rendements extraordinairement faibles (1,80% pour le Bund). Ils restent notamment plus faibles que ceux des papiers américains, malgré la ZIRP et le twist pratiqués par la Fed. Mais les CDS racontent une autre histoire."
"Début août, les CDS sur les obligations à 5 ans allemandes et américaines étaient au même niveau (un peu plus de 60pb). Aujourd'hui, les CDS allemands sont presque deux fois plus élevés que les CDS US. Entre début août et tout récemment, les CDS allemands et britanniques étaient identiques. Depuis quelques séances, les premiers se démarquent des seconds par le haut. On peut interpréter ce phénomène de la manière suivante : si la crise aboutit à une mutualisation du risque souverain, l'Allemagne troquera sa dette AAA contre une dette en théorie de moins bonne qualité."
"Si la structure de la zone euro, d'une manière ou d'une autre, est modifiée, l'Allemagne souffrira énormément économiquement (ce dont Angela Merkel a semble-t-il parfaitement conscience). En ce moment, les Etats membres sont en train de ratifier les dispositions proposées le 21 juillet relatives aux prérogatives de l'EFSF. Mais les moyens de l'EFSF n'ont pas augmenté en proportion des risques que cette facilité est maintenant supposée couvrir (surtout si l'on tient compte de l'aggravation de la crise budgétaire et du ralentissement économique)."
"Ainsi, si l'on imagine simplement que l'EFSF nouvelle version prendra le relai de la BCE pour soutenir les dettes souveraines en stress, et conservera le rythme actuel des achats effectués par la BCE via le SMP (environ 12 milliards d'euros par semaine en moyenne), sa force de frappe sera complètement épuisée en un peu plus de huit mois."
"L'EFSF pourrait ainsi être sollicitée pour recapitaliser les banques (une priorité absolue selon le FMI, et qui implique des montants très importants), et acheter outright des obligations souveraines des pays en stress (la seule dette moyen-long terme de l'Italie dépasse de loin 1.000 milliards d'euros). Une façon de résoudre ce problème serait de leverager l'EFSF."
"Plusieurs solutions sont, théoriquement, possibles. On peut notamment imaginer de transformer l'EFSF en banque, ce qui lui permettrait de se refinancer auprès de la BCE. Cela reviendrait à faire de la monétisation indirecte des dettes souveraines, ce qui a peu de chance d'être bien accueilli à Francfort ; ou bien transformer l'EFSF en compagnie d'assurance, qui couvrirait une partie des pertes sur les obligations souveraines, plutôt que de les acheter outright."
"On peut aussi avancer la mise en place de l'European Stability Mechanism (ESM), qui devait initialement démarrer en juillet 2013. Dans le cadre de l'ESM, une distinction est faite entre les crises de liquidité et de solvabilité. Si un pays est confronté à un problème de solvabilité, il devra négocier avec ses créanciers (en ligne avec les pratiques du FMI), et une assistance lui sera fournie. Autrement dit, les défauts seraient possibles et gérés."