(AOF / Funds) - "Le président de la BCE, Jean-Claude Trichet, a surpris la semaine dernière en déclarant que la BCE pourrait relever ses taux lors de la réunion d'avril. Les marchés ont rapidement intégré cette nouvelle et l'indicateur de Crédit Suisse indique un resserrement de 122 pb au cours des douze prochains mois. Cette déclaration a été faite à l'issue de la réunion du conseil des gouverneurs, qui venait de laisser les taux inchangés. Pourquoi M. Trichet cherche-t-il à effrayer les foules en menaçant d'une hausse des taux d'intérêt ?", s'interroge JP Morgan AM.
"L'explication conventionnelle de ces commentaires est que la BCE s'inquiète des pressions inflationnistes dans la zone euro, l'objectif d'inflation headline de la BCE étant de 2%. Or, le dernier taux headline harmonisé s'est élevé à 2,3% sur un an en janvier, sachant qu'il devrait subir l'impact de la hausse des prix du pétrole. Le fait que M. Trichet ait affirmé que cette hausse des taux ne serait pas la première d'une série laisse penser qu'il cherche à contenir les anticipations inflationnistes."
"Cela ressemble à la situation de juillet 2008 lorsque la BCE a annoncé une unique hausse des taux de 25 pb, pour faire l'inverse moins de trois mois plus tard lorsque l'économie de la zone euro est entrée en récession. Compte tenu d'une politique budgétaire restrictive et de la décélération de la croissance annualisée de la production, cette décision est loin d'être évidente, même si les indicateurs avancés de notre équipe devise suggèrent une croissance supérieure à la moyenne au cours des deux prochains trimestres."
"Une hausse des taux pourrait s'avérer inutile et contribuer à ralentir de nouveau l'économie. Ce serait probablement commettre une erreur d'interprétation que de prendre M. Trichet à la lettre sans replacer ses propos (bien orchestrés) dans un contexte plus global. Les perdants évidents d'un tel resserrement monétaire à ce stade du cycle seraient les pays périphériques (même en considérant l'accélération récente de l'inflation en Espagne)."
"Etant donné leur fragilité, ce resserrement pourrait avoir été négocié lors du sommet de l'UE du 24-25 mars en échange d'un accord de financement avec la Grèce, l'Irlande et le Portugal ou d'un élargissement de la FESF. Espérons que ce soit le cas car l'autre option n'est pas satisfaisante. Si l'économie de la zone euro culmine au cours des deux prochains trimestres, elle risque de ralentir au deuxième semestre 2011 et d'être incertaine en 2012 du fait de ce resserrement tant budgétaire que monétaire. Espérons que la théorie de l'accord secret est la bonne, sinon les marchés de la zone euro risquent des déceptions."
"Notre analyse mensuelle des marchés fait ressortir un ralentissement inquiétant du momentum des bénéfices sur l'ensemble des marchés que nous suivons. Parmi les 24 marchés suivis, seuls 10 connaissent un momentum positif, avec des révisions à la hausse qui dépassent le nombre de révisions à la baisse. Autrement dit, 58% de notre univers fait l'objet d'un momentum négatif. De surcroît, la dynamique semble moins favorable. Seulement 8 marchés sur 24 ont connu une amélioration de leur ratio de révisions à la hausse/révisions à la baisse durant le mois écoulé et seulement 10 au cours des trois derniers mois."
"Il est notable que les analystes du sell-side privilégient davantage les consommateurs que les producteurs de matières premières. Ainsi, au sein de notre échantillon de 24 marchés, il est intéressant de noter que l'Allemagne, Taîwan, le Japon, la Corée, la Pologne et la Suède sont tous dans les deux meilleurs quintiles de notre classement, contrairement à l'Australie, au Brésil, au Canada, à l'Indonésie et à la Russie qui se situent en queue de classement."
"Au niveau régional, le momentum des bénéfices le plus élevé se trouve aux Etats-Unis, suivis du Japon. Les marchés émergents ont fait l'objet d'une nouvelle baisse à 1,02 du ratio de révisions à la hausse/révisions à la baisse le mois dernier, soit le plus bas niveau depuis avril 2009. Au sein du monde émergent, les BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) connaissent désormais un momentum négatif, aussi est-il difficile d'envisager une franche reprise de leur performance relative tant que cette tendance ne se sera pas inversée. Il est intéressant de noter la rapidité du retournement du momentum économique au sein des BRIC."
"Bien que les investisseurs aient porté leur attention sur le resserrement de la politique monétaire en Chine, il convient d'observer qu'il en a été de même ailleurs. Le Brésil a ainsi connu une appréciation de 49% de son taux de change réel depuis décembre 2008. Cela donne lieu probablement à une surévaluation de la devise, le real se situant à présent respectivement à 27% et 57% au-dessus de sa moyenne mobile sur cinq et dix ans. Parallèlement, le taux de change réel de la Russie est à son plus haut niveau depuis 17 ans et à un niveau encore plus élevé que ce qui prévalait juste avant la crise de 1998."
"La croissance annuelle de la production industrielle est proche de zéro en Inde et au Brésil, tandis que la croissance de la production électrique en Chine (une mesure du cycle industriel) est tombée sous la barre des 10% sur un an. Nous serions donc loin de connaître une surchauffe car cela sent plutôt la stagflation... Ce qui est frappant, c'est la rapidité avec laquelle les marchés émergents sont tombés en disgrâce depuis le début de l'année 2011."
"Cependant, nous avons le sentiment qu'il s'agit plutôt d'une correction bienvenue (et non de la fin d'un cycle), dans la mesure où ce sont les positions excessives qui ont été débouclées. Les quatre pays BRIC combinés constituent 48% de l'indice MSCI Emerging Markets. Cela laisse penser qu'il faudra attendre leur redressement avant d'envisager une nouvelle surperformance des marchés émergents."
"Un cocktail intéressant de statistiques a été publié dans un rapport d'une ancienne analyste sell-side du secteur technologique qui a passé plus de deux ans à analyser l'économie américaine comme s'il s'agissait d'une entreprise. Tout en relevant les défis structurels, elle a calculé que les dépenses sociales de la USA Inc. sont actuellement équivalentes à la taille de l'ensemble de l'économie indienne."