La Corée dépend à 97 % de l'étranger pour son pétrole et son gaz. Pour un pays entouré par la Corée du nord, la Russie et la Chine, une véritable gageure. Avec qui plus est un coût considérable : la facture énergétique s’élève à plus de 93 milliards de dollars par an. Aussi, l’ambition du programme « croissance verte » et la dimension des moyens mis en œuvre n’étonnent guère : de 2% actuellement, Séoul entend augmenter la part des énergies renouvelables à 11% en 2030, puis 20% d’ici 2050. Selon l’agence financière Bloomberg, les investissements dans le secteur augmenteraient de 52% d’ici la fin 2010, pour atteindre 4,8 milliards de dollars en 2010.
Jungho Lee, responsable des questions économiques au consulat coréen de Francfort, se montre soucieux de détailler la feuille de route mise en place par Séoul. La stratégie nationale, répondant du nom anglais de "Low Carbon, Green Growth", entend recourir massivement aux ressources renouvelables. Dans son étude comparative analysant les "composants verts" des différents plans de relance économique gouvernementaux, la banque HSBC relève que le secteur industriel coréen est également appelé à lever 10 milliards de dollars supplémentaires.
Samsung a déjà répondu présent avec 4,3 milliards de dollars, Hyundai-Kia Automotive Group avec 3,3 milliards. Par ailleurs, la "Maison Bleue", le siège de la présidence coréenne, espère créer de cette façon près d’un million d’emplois, qu’elle qualifie de "cols verts" pour signifier le passage vers une nouvelle économie conciliant croissance, écologie et qualité de vie.
A situation exceptionnelle, programme exceptionnel
Qualité de vie. L’expression prend tout son sens en Corée du sud, dont la densité urbaine s’élève à plus de 320 habitants par km2. Jungho Lee rapporte que le pays paie actuellement le prix d’une croissance aussi brillante qu’écologiquement funeste : figurant parmi les pays les plus pauvres de la planète à la sortie de la guerre de Corée, le « pays du matin calme » est devenu en l’espace de 60 ans la 12ème puissance économique mondiale (PIB). Point capital, Jungho Lee précise encore que sur les 48,5 millions d’habitants que compte le pays, plus de 22 millions habitent Séoul et son agglomération. C’est près de la moitié de la population du pays, confrontée aux engorgements, à la pollution atmosphérique, et au considérable trafic automobile.
L’Allemagne, pays des forêts et des énergies renouvelables, servirait-elle de référence ? "Les Coréens sont partout !" lâche sans détour Christine Wegner-Sänger, responsable du plan solaire de la ville de Fribourg (voir articles liés). De fait, Jungho Lee explique que la ville de Fribourg est très appréciée par ses compatriotes qui y séjournent régulièrement. Mais pas seulement à Fribourg. Horst Stapp, le maire de Rai-Breitenbach, rapporte que lui aussi a reçu la visite de délégations sud-coréennes, n’ayant pas hésité à parcourir les 12 heures de vol nécessaires pour venir étudier le système énergétique de ce village de 900 habitants (voir article lié).
L’industrie allemande des énergies renouvelables a tôt fait de relever tout le potentiel offert par le tournant vert économique sud-coréen. Dans une étude réalisée par l’agence berlinoise eclaeron, le marché coréen photovoltaïque représente à lui seul un marché "à forte expansion" : 5% en Corée du sud contre 25,7% en Allemagne. Le secteur allemand des énergies renouvelables peut également s’appuyer sur les liens traditionnellement forts entre Berlin et Séoul – scellés par un pacte remontant au 28 novembre 1883 - l’Allemagne figurant par ailleurs en tête des investissements coréens.
Claire Stam à Francfort (Allemagne)