L’édition 2010 marque le 40ème anniversaire du « World Economic Forum » et sa continuité dans un monde économique déséquilibré, toujours marqué par les conséquences de la crise financière. Pourtant, selon la 13ème édition du « ceo survey »- réalisée chaque année par PricewaterhouseCoopers pour le WEF-, les 1 198 chefs d’entreprise intérrogés dans 52 pays expriment « un certain retour à la confiance de la part des dirigeants ». 81 % d’entre eux se déclarent « confiants » ou « très confiants » pour 2010, contre 64 % l’an passé. Ce taux atteint 91% en Amérique du Sud et en Asie ; 80 % en Amérique du Nord et 70 % en Europe de l’Ouest. De fait l’enthousiasme et l’optimisme restent, sans surprise, plus élevés dans les pays émergents : « En matière de confiance, on observe une vraie différence entre pays émergents et pays développés. Les dirigeants d’Amérique latine et d’Asie sont plus confiants que ceux d’Amérique du Nord (11 points d’écart) et davantage encore que ceux d’Europe occidentale (20 points d’écart) » souligne PwC. Dans les pays émergents, plus de 60 % des patrons brésiliens pensent accroître leurs effectifs en 2010, ce chiffre atteint 59 % en Inde et 53 % en Chine. Dans les pays développés, les patrons affichent des intentions de recrutement plutôt élevées compte-tenu du contexte actuel : 42% des dirigeants anglais et 30 % des patrons français souhaitent recruter dans l’année.
Par ailleurs, si la récession a fortement impacté les investissements des entreprises dans de nombreux domaines, le changement climatique semble relativement épargné, note l’étude. « Parmi la petite majorité de dirigeants qui avait mis en place des actions de lutte contre le changement climatique avant la crise, 61 % n’ont pas modifié leurs investissements et 17 % les ont augmentés. Seuls 13% les ont freinés ». Pour autant souligne l’étude, la réponse des entreprises au changement climatique « est liée aux politiques mises en place par les gouvernements et aux exigences réglementaires ».
Enfin, au moment où l’Europe et les Etats-Unis cherchent à réguler davantage le système financier international, les dirigeants (60%) expriment leur préoccupation quand à « l’excès de réglementation », un sujet qui rend particulièrement inquiets 27% d’entre eux.
Nouveau prix cette anné : le Greenwash Award
Parallèlement au WEF, la cérémonie des Public Eye Awards organisée par l’ONG suisse la Déclaration de Berne et Greenpeace, a remis les "prix de la honte" - le "Global Award" pour les multinationales, le "Swiss award" et le prix du public "People's Award" , ainsi qu’une nouveau prix , le "Greenwash Award", attribué à une institution publique ou privée qui récompense des entreprises « pourtant connues pour leurs agissements néfastes ». L’entreprise Roche a obtenu cette année les deux premiers prix, les ONG ayant voulu dénoncer les pratiques du laboratoire suisse en Chine, où elle est accusée de pratiquer des tests pour un médicament sur plus de 300 organes sans dire d'où ils proviennent. « Environ 90% des organes transplantés dans ce pays sont issus de détenus condamnés à mort, » selon les ONG.
Suez GDF est arrivé en deuxième position pour le prix du public, pour sa responsabilité dans le consortium de construction du barrage de Jirau sur la rivière Madeira, en Amazonie brésilienne, un projet que les ONG dénoncent pour ses "conséquences sociales et environnementales".
Le « Global Award » a été décerné à la Royal Bank of Canada pour son rôle de principal financier des producteurs de pétrole à partir des sables bitumineux. Ces entreprises exploitent " le pétrole brut le plus sale du monde dans la province canadienne de l'Alberta sur une superficie plus grande que la Suisse et l'Autriche réunies" indiquent les ONG.
Enfin, le "Greenwash Award" a été inauguré par une attribution au "CEO Water Mandate" de l’ONU, qui réunit entreprises, ONG et agences onusiennes dans un groupe de travail sur la gestion durable l’eau. Pour les ONG, le CEO Water mandate « est l’exemple même du rôle ambigu des organisations internationales qui permettent aux entreprises de s’acheter une bonne réputation ». « Des groupes comme Nestlé, Coca Cola ou Dow Chemical font partie de ce "club" et prétendent lutter contre la crise de l'eau, mais poursuivent en réalité leur politique de privatisation de l'eau sans tenir compte des normes écologiques et sociales", dénoncent les ONG.
Animée par l’actrice berlinoise Julia Jentsch, la cérémonie a accueilli cette année Joseph Stiglitz (par videoconférence ), prix Nobel d’économie, et Jürgen Trittin, ancien ministre de l’environnement allemand - président du groupe parlementaire de l’Alliance 90/Les Verts. "La crise financière durable a mis en évidence de façon implacable les erreurs systémiques du capitalisme tel que nous le connaissions, indiquant ainsi la voie d'une thérapie possible", a estimé le Prix Nobel d'économie dans son discours*. Mais "les fondamentalistes du marché conduit par la main invisible cher à Adam Smith sont à l’affût [et tentent] d’affaiblir la nouvelle prise de conscience politique, "a-t-il ajouté.
*propos recueillis par le quotidien suisse Le Temps