La Commission européenne a exhorté jeudi au compromis sur la crise de la dette alors que les difficultés s'accumulent en vue du sommet européen de dimanche, avec des divergences entre pays sur les moyens d'enrayer la contagion et de nouvelles inquiétudes sur la santé de la Grèce.
A trois jours de ce rendez-vous qualifié de "crucial" à Bruxelles, le chef de l'exécutif communautaire José Manuel Barroso a appelé toutes les capitales au "compromis" pour aboutir à des décisions "résolues" et "immédiates".
Son message s'adresse aux dirigeants européens, à commencer par la chancelière allemande Angela Merkel et le président français Nicolas Sarkozy, qui sont divisés sur les modalités permettant de renforcer le Fonds de soutien aux pays en difficulté de la zone euro (FESF). Or, il s'agit d'un instrument-clé pour enrayer la crise de la dette et empêcher qu'elle n'emporte l'Italie ou l'Espagne.
Sur ce point, "il n'y a pas de proposition commune" européenne pour le moment, a reconnu jeudi à Berlin le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble.
Doté aujourd'hui d'une capacité effective de prêts de 440 milliards d'euros, le FESF ne dispose pas d'une enveloppe suffisante pour faire face à une contagion de très grande ampleur et recapitaliser les banques en difficulté.
D'où l'idée en discussion depuis des semaines d'augmenter sa force de frappe en démultipliant sa capacité d'intervention via un effet de levier, sans nouvelle garantie des Etats.
Le scénario sur la table est de "multiplier par cinq" la capacité d'intervention du Fonds, a indiqué jeudi une source gouvernementale. Toutefois, il doit garder des réserves pour les autres tâches qui lui sont assignées et donc "logiquement, seule une partie des 440 milliards de réserve du FESF pourra servir à l'effet de levier", dit-elle.
Problème: des divergences persistent entre Paris et Berlin sur le choix de l'effet de levier, selon la même source, en dépit des assurances apportées par le ministre des Finances Wolfgang Schäuble qui parle d'un "accord total" franco-allemand. Et le mini-sommet de mercredi soir à Francfort n'a pas permis de les aplanir.
L'Allemagne cherche d'abord à limiter l'augmentation de la capacité d'intervention du FESF. M. Schäuble a évoqué un montant de 1.000 milliards d'euros, selon la presse allemande, alors que d'autres scénarios sur la table des discussions évoquent un montant de plus du double.
Dans le détail, Paris souhaite accroître la force de frappe du FESF en le dotant d'une licence bancaire pour qu'il puise emprunter en grande quantité auprès de la Banque centrale européenne. Une option que Berlin et la BCE refusent au motif qu'elle violerait le traité de l'UE interdisant à l'institut monétaire d'aider budgétairement des gouvernements de la zone euro.
"Nous ne pouvons pas satisfaire les attentes de la part des gouvernements (...) sur le fait que la BCE en fasse plus", a mis en garde le chef économiste de la BCE, Jürgen Stark, craignant pour l'indépendance de l'institution.
L'Allemagne plaide pour un autre scénario consistant à faire jouer au FESF le rôle d'assureur auprès des détenteurs de titres de dette et couvrir leurs pertes à hauteur de 20 à 30% si un Etat faisait défaut. Objectif: les encourager à réinvestir dans les pays jugés fragiles.
C'est en raison de ces blocages que Nicolas Sarkozy a fait mercredi un déplacement en urgence à Francfort pour rencontrer Angela Merkel, alors que son épouse Carla Bruni s'apprêtait à accoucher.
Pour compliquer encore la situation, la presse grecque évoque des difficultés en vue du versement de la prochaine tranche de 8 milliards d'euros de prêts internationaux vitale pour éviter la faillie du pays, alors qu'une décision est attendue à ce sujet ce week-end côté européen.
Le quotidien grec Kathimerini parle de divergences entre la Commission européenne et le FMI sur la capacité de la Grèce à faire face à long terme à son énorme dette.