Vrai clash ou fausse sortie? La troïka des créanciers de la Grèce a quitté Athènes vendredi en donnant 10 jours au gouvernement pour faire avancer les réformes structurelles dans le pays, plombé par une récession qui l'empêchera de tenir son objectif d'économie budgétaire.
En pleins préparatifs du budget 2012, les auditeurs de la Grèce ont passé une semaine à éplucher les comptes et à chiffrer les efforts faits et à faire pour réduire dépenses et dette publiques. Leur mission vise à débloquer un sixième versement d'aide financière au pays, pris au piège d'un surendettement qui englue l'Europe.
Plusieurs médias ont interprété le départ jugé précipité des représentants de l'UE, du FMI et de la BCE comme un clash avec le gouvernement grec sur l'ampleur de l'effort de rigueur à fournir pour poursuivre l'assainissement des comptes.
Mais une telle rupture a été démentie aussi bien par le ministère des Finances que par la troïka. Elle a évoqué dans un communiqué de "bons progrès" dans les discussions, soulignant avoir "provisoirement quitté Athènes" pour "permettre aux autorités de terminer leur travail technique" lié "au budget 2012 et aux mesures structurelles de renforcement de la croissance".
La troïka reviendra "dans 10 jours" quand "le projet de budget sera prêt" a confirmé le ministère des Finances, évoquant lui aussi un "bon climat de coopération".
Néanmoins les épines s'accumulent. Pour débloquer les 8 milliards d'euros du 6e versement du prêt, les auditeurs espéraient enregistrer les progrès faits par la Grèce qui avait prévu fin juin de réduire son déficit public à 7,4% de son PIB en 2011 (contre 10,5% en 2010).
Cet objectif, avalisé par les créanciers du pays, ne sera pas atteint et devra être relevé, a reconnu Athènes vendredi, la presse évoquant la barre des 8,8%.
Selon le ministre des Finances, Evangélos Vénizélos, il s'agit moins d'un dérapage des dépenses - dont l'objectif devrait être quasiment tenu - que d'une amplification de la récession qui réduit d'autant les rentrées.
Les problèmes économiques du pays sont accentués par l'austérité réclamée par les créanciers, et le pays est plongé dans un cercle vicieux austérité-récession dénoncé depuis de longs mois par des économistes comme le prix Nobel Paul Krugman.
Côté créanciers, sous couvert d'anonymat, on dénonce néanmoins une absence de progrès pour la mise en oeuvre des réformes dites structurelles jugées nécessaires pour activer la relance.
"Les mesures fiscales annoncées ne sont pas là, la liste des entreprises à privatiser n'est pas finalisée et il n'y a toujours pas de grille de salaires des fonctionnaires" qui permettrait d'évaluer le coût annuel de la fonction publique dans le budget, a déclaré une source proche de la troïka à l'AFP.
La troïka attend un accord politique sur ces points et souhaite un consensus des partis et syndicats, a martelé cette source.
Le syndicat de la fonction publique a immédiatement protesté dans un communiqué contre une réduction supplémentaire du train de vie de l'Etat grec, s'annonçant déterminé à lutter contre baisses de salaires et suppressions d'emplois.
Le mouvement des Indignés, évacué cet été de la Place Syntagma dans le centre d'Athènes après deux mois de campement, a pour sa part annoncé une reprise de la mobilisation pour ce week-end.
Selon une source proche de la troïka, les difficultés en Grèce compliquent encore les délicates discussions menées en parallèle par les pays de la zone euro pour boucler le deuxième plan d'aide promis au pays le 21 juillet dernier.
"Plus les nouvelles venant d'Athènes sont mauvaises, plus la pression des pays comme la Finlande qui exigent des garanties pour les nouveaux prêts à la Grèce augmente", a indiqué cette source.
La Bourse d'Athènes, qui avait commencé la semaine sur une envolée de plus de 14% après l'annonce d'une fusion bancaire, accusait le coup vendredi, avec une baisse de 3,98% peu avant la fermeture.