La croissance indienne a marqué le pas au premier trimestre de l'exercice budgétaire 2010-2011, avec une hausse de 7,7% reflétant l'impact du durcissement de la politique monétaire sur l'activité économique du pays, selon les chiffres publiés mardi.
La différence avec le premier trimestre (avril-juin) de l'exercice budgétaire précédent est criante: la croissance s'était envolée de 9,3%. Les trois premiers mois de l'exercice marquent aussi un fléchissement par rapport au trimestre précédent (+7,8% de croissance).
Le marché s'attendait à ce ralentissement au vu de la politique agressive pratiquée par la banque centrale pour tenter d'enrayer une inflation frôlant les 10%, gros point noir de l'économie. Les analystes avaient anticipé une croissance de 7,6%.
La banque centrale, la Reserve Bank of India (RBI), a relevé onze fois ses principaux taux en moins d'un an et demi et elle a prévenu qu'elle comptait maintenir ce cap au cours des prochains mois, faisait fi des inquiétudes du milieu des affaires.
Les analystes s'attendent à ce que la RBI augmente de nouveau ses principaux taux d'intérêt lors de sa prochaine réunion de politique monétaire, prévue en septembre, pour atteindre coûte que coûte son objectif d'une inflation de l'ordre de 5% d'ici la fin de l'année budgétaire, au 31 mars 2012.
La RBI et le ministère des Finances considèrent cette politique drastique comme un sacrifice assumé et nécessaire à la croissance, même si la banque centrale a reconnu la semaine dernière que l'année risquait d'être "difficile" économiquement.
Ces chiffres "montrent que la politique monétaire agressive de la RBI a eu un impact sur la croissance. Mais cela ne va pas stopper la hausse des taux", a estimé Brian Jackson, un analyste chez la Royal Bank of Canada à Hong Kong, qui s'attend à une hausse supplémentaire de 50 points de base d'ici à fin décembre.
Selon les chiffres publiés mardi, la production dans le secteur de la construction s'est appréciée de 1,2% sur un an. Le secteur agricole a, lui, connu une petite hausse de 3,9%.
Une étude publiée lundi par la fédération des Chambres de commerce et d'industrie a montré que la confiance du milieu des affaires en Inde avait chuté en juin à son plus bas niveau depuis deux ans.
Menée auprès de 300 entreprises des secteurs textile, sidérurgique, énergétique ou encore automobile, cette étude a souligné l'inquiétude croissante face à un ralentissement de la croissance à la fois intérieure et mondiale.
"Une hausse des taux d'intérêt et une faible demande (...) sont en train de faire des dégâts", a commenté la fédération.
Alors que l'Inde pensait retrouver d'ici mars 2012 le "chiffre magique" de 9% de croissance annuelle, un rythme perdu depuis la crise financière mondiale, la troisième puissance économique d'Asie se voit aujourd'hui contrainte de réviser à la baisse ses ambitions.
Après de légers réajustements des prévisions annuelles ces derniers mois, le Comité du conseil économique auprès du Premier ministre a annoncé début août qu'il tablait désormais sur un taux de 8,2%, soit une performance moins bonne qu'en 2010-2011 (+8,5%).
Le ministère des Finances a lui aussi récemment révisé ses objectifs, visant officiellement 8,5%. Mais certains économistes indépendants se montrent encore moins optimistes, allant jusqu'à évoquer un taux de 7,3%.
Même si une croissance de l'ordre de 7% peut sembler élevée au regard de l'anémique croissance occidentale, elle ne suffirait pas à réduire le niveau de pauvreté du pays, seulement possible à partir d'un seuil de 10%, selon les calculs du gouvernement.