Comme promis, les riches seront mis à contribution pour aider la France à se désendetter, mais leur effort passera par une taxe limitée dans le temps, jugée "symbolique" par les experts.
Le gouvernement va créer en 2012 une "contribution exceptionnelle sur les hauts revenus", a annoncé mercredi le Premier ministre François Fillon.
Cette taxe de 3% visera les revenus du travail et du capital dépassant 500.000 euros par an, et rapportera 200 millions annuels dans les caisses de l'Etat.
"Il s'agit d'une taxation exceptionnelle" qui sera "supprimée" lorsque le déficit public de la France aura été ramené à 3% du PIB, a précisé le Premier ministre. Si la France respecte ses promesses, la taxe restera en vigueur jusqu'en 2013 et disparaîtra l'année suivante.
"C'est assez symbolique et dérisoire", a déploré le président de la commission des Finances du Sénat, Jean Arthuis.
A l'instar d'un grand nombre de parlementaires de la majorité et d'économistes, le sénateur centriste privilégiait la création d'une ou deux tranches d'impôt supplémentaires sur les hauts revenus.
Plus virulent encore, le Parti socialiste a dénoncé une mesure "emblématique" du "cynisme" du gouvernement, accusé de demander aux riches "de ne rendre qu'un neuvième" du "chèque" qu'il leur a fait en allégeant l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF).
"Les efforts demandés aux salariés sont assez conséquents" tandis que ceux "demandés aux entreprises et aux très hauts revenus sont beaucoup plus faibles", a fait écho la CFDT.
Faux, a répliqué François Fillon, venu défendre au 20 heures de TF1 son plan d'austérité. "C'est le symbole de la participation de l'ensemble de la nation à l'effort" dans une "situation difficile", a-t-il estimé.
La ministre du Budget, Valérie Pécresse, a pour sa part chiffré à 3,7 milliards d'euros (sur un total de 12 milliards) la contribution totale des ménages les plus aisés au plan, soit "les deux tiers de l'effort" demandé à la totalité des ménages français, selon elle.
"Quand on est aisé, on gagne plus, on possède plus", a-t-elle expliqué. "Dans le plan que nous proposons, il y a la taxation exceptionnelle, mais aussi la taxation des revenus du patrimoine (+1,3%). Et il y a aussi une taxation supplémentaire de la plus-value de la cession des résidences secondaires. Tout ça est un package sur les ménages aisés".
Plusieurs grandes fortunes françaises, dont Liliane Bettencourt, s'étaient dites prêtes, dès mardi, à une contribution "exceptionnelle" mais "raisonnable".
"Ils ont pris les devants en disant +taxez-nous un peu+, car ils savent qu'ils sont très peu imposés", balaye Thibault Gajdos, économiste au CNRS.
Mais, au-delà du combat politique, les économistes estiment que le compte n'y est pas.
"C'est vraiment de la symbolique politique", lance Elie Cohen, directeur de recherches au CNRS. Selon lui, à huit mois de la présidentielle, le gouvernement a voulu "aller dans le sens de l'opinion, favorable à une taxation des plus riches".
"Mais il faudrait des mesures plus durables", comme de nouvelles tranches d'imposition sur le revenu ou une taxation du capital renforcée, a-t-il souligné.
Les économistes interrogés par l'AFP sur une telle mesure sont unanimes sur son aspect symbolique. "Cacahouètes", lance Thibault Gajdos. "Cosmétique", confirme Christian Saint-Etienne, professeur à Paris-Dauphine.
Alors que l'impôt sur le revenu est critiqué de toutes parts, notamment par la Cour des comptes qui a relevé dans un récent rapport qu'il devient "dégressif" pour les quelques milliers de contribuables les plus aisés, tous estiment que la situation actuelle appelle une vraie réforme fiscale et un encadrement beaucoup plus strict des niches.
"Le système actuel arrive en bout de course", martèle Elie Cohen.