La compagnie aérienne australienne Qantas a dévoilé mardi un vaste plan de restructuration sur cinq ans, véritable pari sur la croissance en Asie qu'il accompagne d'une vaste commande d'Airbus A320, mais qui devrait entraîner la suppression d'un millier d'emplois.
Qantas "souffre de grosses pertes financières et d'un déclin marqué de sa part de marché. Pour y remédier, nous avons besoin de changements fondamentaux", a déclaré Alan Joyce, son PDG.
Selon lui, la compagnie - qui publiera ses résultats annuels le 24 août - devrait perdre 206 millions de dollars australiens (150 millions d'euros), avant impôts, pénalisée par des catastrophes naturelles d'ampleur et par la hausse du prix des carburants.
Elle utilise "d'énormes quantités de capitaux et notre base de coûts est supérieure d'environ 20% à celle de NOS principaux concurrents", a-t-il ajouté. "Ne rien faire, ou se contenter de quelques mesurettes, n'est simplement pas possible".
Son projet passe par un report, pouvant aller jusqu'à six ans, de la livraison de six A380. Ces livraisons étaient programmées "après 2013", a précisé Airbus dans un communiqué.
En contrepartie, Qantas a l'intention d'acheter jusqu'à 110 A320 pour environ 9,5 milliards de dollars (prix catalogue, 6,6 milliards d'euros). Cet engagement d'achat d'A320, le premier de la compagnie australienne, porte sur au moins 106 appareils, dont 78 de la gamme Neo qui sont moins gourmands en carburant, a détaillé Airbus.
D'autre part, Qantas pourra acheter quatre A320 traditionnels supplémentaires selon leur "disponibilité sur le marché", a précisé Airbus.
Ces appareils équiperont notamment deux nouvelles compagnies créées par Qantas avec des partenaires: une compagnie haut de gamme (premium) entre l'Australie et l'Asie, et une compagnie à bas coûts lancée d'ici fin 2012.
Pour cette dernière, baptisée Jetstar Japan, Qantas s'est associé à parts égales avec deux partenaires japonais, Japan Airlines et Mitsubishi Corporation. Sa flotte devrait compter rapidement 24 appareils effectuant dans un premier temps des vols intérieurs au Japon, puis vers les principales villes d'Asie.
L'objectif de cette restructuration est de renouer avec des bénéfices opérationnels pour les activités internationales, a précisé M. Joyce, estimant que l'Asie était la région la plus importante pour Qantas.
Les Australiens "avaient l'habitude de voler au-dessus, ou via l'Asie, pour aller en Europe. Maintenant, nous volons vers l'Asie pour les affaires et pour les loisirs. Alors que les économies asiatiques montent en puissance, l'avenir, ce sera les voyages vers et à l'intérieur de l'Asie", a-t-il prédit.
Dans cette optique, Qantas va développer ses activités avec sa partenaire britannique British Airways.
A partir de 2012, Qantas maintiendra ses liaisons entre l'Australie et Bangkok et entre l'Australie et Hong Kong, mais les liaisons Bangkok-Londres et Hong Kong-Londres seront effectuées par BA. En échange, Qantas récupèrera la liaison Bangkok-Sydney de BA.
La compagnie va également transférer son point d'entrée en Amérique du sud de Buenos Aires à Santiago, au Chili.
Outre la commande prévue de cent dix A320, dont la livraison devrait s'étaler sur dix à quinze ans, Qantas dispose d'options sur 194 appareils pour parfaire le renouvellement de sa flotte.
Ces annonces ont été saluées par Peter Harbison, directeur général du Centre pour l'aviation d'Asie-Pacifique: "Ils devaient faire quelque chose et ces changements sont un pas dans la bonne direction".
Mais elles ont été vivement critiquées par pilotes et techniciens de la compagnie.
Steve Purvinas, patron de l'Association des ingénieurs aériens australiens, a estimé "tout à fait probable que, d'ici la fin de la semaine prochaine", les techniciens engagent des actions, y compris en justice.
Et l'Association des pilotes australiens et internationaux (AIPA) fera "tout son possible" pour stopper ce plan, prévenant qu'elle aurait recours à toutes les options.
Les pilotes sont déjà en conflit avec la direction, accusée de vouloir sous-traiter de nombreux emplois. 1.700 d'entre eux ont voté en juillet en faveur d'une action syndicale, pour la première fois depuis 45 ans.
L'action Qantas a terminé en repli de 0,33% à 1,52 dollar australien à la Bourse de Sydney, après avoir bondi jusqu'à 5% en séance.