La mise en place d'euro-obligations, défendue par certains responsables européens comme un moyen de renforcer la solidarité de la zone euro, restera absente mardi du menu des discussions, très attendues par les marchés, entre Nicolas Sarkozy et Angela Merkel.
"Nous n'évoquerons pas les euro-obligations de notre propre chef car ce n'est pas selon nous une voie souhaitable ou praticable", a dit lundi Steffen Seibert, porte-parole de la chancelière allemande.
"Nous avons une politique monétaire commune et une politique budgétaire individuelle de chaque pays", ce qui se traduit par des taux d'intérêt différents, et "tant que c'est le cas, des euro-obligations ne sont pas une option", a renchéri un porte-parole du ministère allemand des Finances.
Interrogée par l'AFP, la présidence française a confirmé que les euro-obligations n'étaient pas à l'ordre du jour.
L'émission de telles obligations, dont le taux serait une moyenne de ceux auxquels les différents pays membres se financent, serait évidemment défavorable au meilleur élève de la zone euro: l'Allemagne. Mais elle permettrait aux pays les plus fragiles, comme la Grèce, l'Irlande et le Portugal, de se refinancer dans de bien meilleures conditions.
Plusieurs appels à la création de ces obligations européennes, parfois appelées "eurobonds", ont été lancés ces derniers jours.
Le chef de file des Libéraux européens, l'ancien Premier ministre belge Guy Verhofstadt, a souhaité lundi ce débat. "Il faut d'urgence un débat et une analyse sur la façon dont les euro-obligations peuvent être utilisées", a-t-il affirmé, jugeant que, même si le sujet n'est pas au menu de la réunion de mardi, la position de Berlin a évolué.
"Je pense que les différentes conditions dont (le ministre allemand des Finances, Wolfgang) Schäuble a assorti l'utilisation des euro-obligations doivent être examinées en détail. Si le gouvernement allemand affiche désormais une plus grande ouverture concernant de radicales réformes, le processus entre alors dans une phase cruciale", a-t-il dit.
"S'il y avait eu les +eurobonds+, nous ne serions pas arrivés à (la crise d') aujourd'hui", a affirmé samedi le ministre italien de l'Economie, Giulio Tremonti, un des pays de la zone euro en difficulté sur les marchés à cause du poids de sa dette publique, ajoutant être "en attente de développements".
La semaine dernière, le ministre britannique des Finances, George Osborne, dont le pays n'a pas adopté la monnaie unique, avait estimé que "des solutions comme les euro-obligations ou d'autres formes de garanties doivent désormais être considérées sérieusement".
Le spéculateur philantrope américain George Soros, fameux pour avoir gagné plus d'un milliard de dollars en pariant contre la livre britannique en 1992, a aussi lancé un appel à ces titres européens.
"L'Europe a besoin d'euro-obligations", a déclaré M. Soros dans une tribune publiée lundi par le Financial Times.
"Comme le destin de l'Europe dépend de l'Allemagne, et parce que les euro-obligations vont faire peser un risque sur le crédit de l'Allemagne, toute discussion doit se faire avec l'Allemagne au volant", prévient M. Soros.
"L'Allemagne doit accepter d'établir des règles que les autres puissent suivre", estime l'investisseur.
Sur les marchés financiers toujours fébriles, "il y a eu des spéculations ce week-end selon lesquelles les euro-obligations pourraient être mises en place (...). Beaucoup voient cela comme la panacée, mais ce sera perçu comme trop peu et trop tard pour beaucoup" d'opérateurs du marché, a estimé Lee McDarby, responsable des transactions chez Investec Corporate Treasury, basé à Londres.