La chute boursière de l'été 2011 évoque chez les investisseurs le souvenir funeste de la crise financière de 2008 dont elle est la réplique, sur fond d'endettement des Etats qui paient le prix du sauvetage du système financier après la chute de Lehman Brothers.
Rumeurs, volatilité, dégringolade, écroulement des valeurs bancaires: un air de déjà vu flotte sur les marchés boursiers, particulièrement depuis quelques jours, les indices chutant de 4% à 5%.
Les volumes d'échanges quotidiens très fournis, de plus de 6 milliards d'euros à Paris, sont symptomatiques d'une crise boursière.
"C'était une séance folle. Le secteur bancaire n'avait pas été attaqué aussi violemment depuis Lehman Brothers", avait commenté mercredi Renaud Murail, gérant d'actions chez Barclays Bourse, après la chute des valeurs bancaires en Europe.
Si le vent de panique qui souffle sur les marchés est similaire a celui qui a suivi la faillite de la banque d'affaires américaine, l'ampleur des variations n'atteint pas encore les sommets de fin 2008.
Les marchés avaient alors connu des séances de baisse puis de rebond dépassant souvent les 6%, tandis que la volatilité mesurée par l'indice Vix dépassait les 80 contre moins de 50 ces derniers jours.
Comme en 2008, "plus personne ne sait où il habite. Ce qui est comparable, c'est qu'on vient de perdre 20%" en Bourse à Paris depuis quinze jours, comme en octobre 2008, résume Waldemar Brun-Theremin, gérant chez Turgot Asset Management.
"En 2008, il y avait beaucoup plus d'inconnues. Tout le monde ne maîtrisait pas tous les instruments financiers complexes à l'époque", ajoute M. Brun-Theremin.
Les banques restent toutefois les acteurs centraux de la tourmente. Le marché de prêt de court terme entre établissements subit quelques tensions mais aucune paralysie comme en 2008 quand "tout le monde voulait se refiler des titres pourris", rappelle Philippe Waechter, économiste chez Natixis.
Ce qui inquiète désormais ce sont les banques trop exposées à des pays dont la solvabilité laisse à désirer, les investisseurs en venant à se demander si le nouveau Lehman Brothers n'est pas un Etats endetté comme l'Espagne et l'Italie voire les Etats-Unis.
Les Etats dont la dette a explosé depuis qu'il a fallu voler au secours du système financier en 2008 sont désormais la cible des marchés et cet endettement fait planer le risque d'un ralentissement de la croissance mondiale.
"Selon un principe plutôt général, il n'y a pas de croissance sans dette. Or désormais, on a la dette et une faible croissance", résume Christophe Donay, chef économiste chez Pictet à Genève.
Le dilemme qui en découle est que les Etats n'ont plus aucune marge de manoeuvre budgétaire pour relancer la machine.
"Ce qui est très grave c'est qu'on n'est pas sûr d'avoir les solutions", explique M. Brun-Theremin.
Le salut ne peut venir pour l'heure que des banques centrales, qui depuis 2008 ont levé plusieurs de leurs tabous et n'hésitent plus à faire tourner la planche à billets aux Etats-Unis et à racheter de la dette en Europe.
"Cela peut éviter un emballement à la baisse des marchés financiers mais peut-être pas créer un effet de relance", tempère M. Donay, sachant qu'en outre une telle intervention inonde le marché de liquidités et peut créer de nouvelles bulles.
Au total, "on arrive au bout d'un modèle", résume Yves Marçais, vendeur d'actions chez Global Equities.
La grande nouveauté issue de cette crise est que les pays industrialisés surendettés ne peuvent plus compter sur eux pour leur croissance, mais vont dépendre désormais de la vigueur de l'Asie voire de l'Amérique latine.
"C'est un vrai changement de régime, qui est intéressant à suivre, mais perturbant", résume M. Waechter.