Le sort des travailleurs domestiques se joue ces jours-ci à Genève, la conférence internationale du travail s'apprêtant à adopter une convention visant à garantir un travail décent à des millions de personnes dans le monde, essentiellement des femmes.
Si le document est accepté la semaine prochaine, il s'agira du premier instrument juridique international sur la question, fait valoir Manuela Tomei, directrice du programme du Bureau international du travail (BIT) sur les conditions d'emploi et de travail.
"Ce serait historique", insiste-t-elle.
Selon un rapport du BIT préparé pour la 100e conférence internationale du travail de cette année, le travail domestique absorbe une proportion significative de la main-d?oeuvre, variant de 4 à 10% de l?emploi dans les pays en développement et atteignant jusqu?à 2,5% dans les pays industrialisés. Soit au moins 52,6 millions de personnes dans le monde.
Mais l'organisation estime que le véritable chiffre avoisine les 100 millions, certains pays sous-évaluant leurs statistiques.
Leur composition varie par pays et au fil du temps mais, partout, les effectifs augmentent, constate Mme Tomei.
"L?évolution de l?organisation du travail et l?intensification des tâches, ainsi que la hausse sensible du taux d?activité des femmes qui les a rendues moins disponibles pour les tâches ménagères non rémunérées sont à l?origine de cette augmentation", explique-t-elle.
Cependant, malgré son importance accrue, relève le rapport, le travail domestique "reste bien souvent synonyme de charge écrasante, sous-payée et ne bénéficiant d?aucune protection".
La convention devrait donc garantir un traitement similaire à celui dont bénéficient les autres catégories d'employés et exige des gouvernements de vérifier que les travailleurs domestiques comprennent les termes de leur contrat.
Elle veut aussi offrir aux travailleurs domestiques un jour de repos par semaine et entend empêcher les employés d'obliger leurs travailleurs domestiques à rester sur le lieu de travail pendant leurs congés.
Certains pays, comme les Philippines et l'Uruguay, ont déjà fait part de leur volonté de ratifier une telle convention, selon Mme Tomei.
Si les 183 Etats membres de l'OIT, représentés par deux délégués gouvernementaux, un délégué employeur et un délégué travailleur, parviennent à se mettre d'accord sur un texte final, ce dernier sera soumis à l'assemblée le 15 juin. Pour qu'elle entre en vigueur, la convention doit être ratifiée par au moins deux pays.
Lourdes Trasmonte, chef de la délégation des Philippines, a souligné l'importance d'une telle convention pour son pays.
"C'est un droit universel pour tous les travailleurs d'être traités avec respect, d'être protégé et de bénéficier des droits à la vie privée, à la santé et à la sécurité", a-t-elle dit à l'AFP.
Pour sa part, le directeur du secrétariat de l'OIT, Juan Somavia, s'est déclaré confiante sur l'adoption du projet de convention qu'il a qualifié d"historique".
Mme Trasmonte a fait valoir que le projet, sur lequel l'OIT planche depuis plusieurs années, a désormais le soutien des pays du Golfe.
Le chef de la délégation sud-africaine, Virgile Seafield, s'exprimant au nom du groupe africain, a également donné son feu vert à la convention. Le Brésil y est également favorable.
Reste que la convention n'est pas un instrument juridique contraignant pour les Etats. Mais les pays qui ne la ratifient pas "risquent de sentir des pressions", a fait valoir Nisha Varia, de Human Rights Watch.